Retrouvez des textes et des vidéos inédites quotidiennement sur ma page Facebook
et toutes mes vidéos sur ma chaîne YouTube
Découvrez le programme de mes activités sur mon site portail !

samedi 30 avril 2011

La sympathie et la compassion

Extrait de « Perles du coeur d'Amma » d'Amma


Amma, qu'est-ce que la véritable compassion ?

La véritable compassion, c'est la faculté de voir et de connaître ce qui est au-delà.
Seuls ceux qui sont capables de voir au-delà peuvent apporter une aide réelle et élever la conscience d'autrui.

Au-delà de quoi ?

Au-delà du corps et du mental, au-delà de l'apparence extérieure.

Alors, Amma, quelle est la différence entre la sympathie et la compassion ?

La compassion, c'est l'aide réelle que l'on reçoit d?un maître authentique. Le maître voit au-delà. Tandis que la sympathie, c'est l'aide temporaire que vous recevez de votre entourage. Et la sympathie ne peut pas aller en profondeur sous la surface ni aller au-delà. La compassion est la compréhension juste jointe à une connaissance plus profonde de la personne, de la situation et de ce dont elle a vraiment besoin. La sympathie est plus superficielle.

Comment les distinguer ?

C'est difficile. Mais Amma va te donner un exemple. Il, arrive souvent qu'un chirurgien demande à ses malades de se lever dès le deuxième ou le troisième jour qui suit une opération, même importante. Si le malade est récalcitrant, un bon médecin, qui connaît les conséquences fâcheuses d'une immobilisation prolongée, arrivera toujours à faire sortir le patient du lit et à le faire marcher. La famille du malade, qui le voit souffrir et lutter, dira peut-être : « Que le médecin est cruel ! Pourquoi le force-t-il à marcher alors qu'il ne veut pas ? Vraiment, il exagère ! »
Dans cet exemple, on peut considérer que la famille fait preuve de sympathie et le médecin de compassion. Dans ce cas, qui aide réellement le malade, le médecin ou sa famille ? Si le patient se dit : « Ce docteur n'est bon à rien. Après tout, qui est-il pour me donner des instructions ? Que sait-il de moi ? Il peut bien s'égosiller s'il le veut, je ne l'écouterai pas. » Une telle attitude n'aide jamais le malade.

La sympathie peut-elle nuire à quelqu'un ?

Si nous ne faisons pas attention et offrons notre sympathie sans comprendre les aspects subtils d'une situation donnée et le tempérament de la personne, cela peut s'avérer nuisible. Il est dangereux d'accorder trop d'importance à des paroles de sympathie. Cela peut même devenir une obsession chez la personne et détruire peu à peu sa faculté de discernement en tissant autour d'elle une sorte de petit cocon. Comme elle se sent réconfortée, elle ne fera peut-être jamais aucun effort pour sortir de la situation. Sans en avoir conscience, elle risque de s'enfoncer de plus en plus dans les ténèbres.

Amma, qu'entends-tu par le mot « cocon » ?

Amma veut dire que l'on perd la capacité de regarder profondément en soi, de voir ce qui s'y passe réellement. On accorde alors trop d'importance aux paroles d'autrui, on fait confiance aveuglément sans utiliser correctement la faculté de discerner.
La sympathie est un amour superficiel qui ignore totalement la racine du problème. Tandis que la compassion est un amour qui voit la source réelle du problème et le traite de manière appropriée.

vendredi 29 avril 2011

Que peut-on faire sinon attendre ?

Questions/réponses à Francis Lucille
Traduit de l'anglais par Stéphane Badach et Francis Lucille


Dans la réponse à la question 43 « Est-il vrai qu’il n'y a rien que l’on puisse faire pour s’éveiller ? » vous avez répondu : « L’assertion 3 est exacte si le "vous" dont il est question est le faux "vous", fausse s’il est le vrai. Comment le faux "vous" pourrait-il rechercher sa fin ? Comment pourrait-il, en réalité, faire quoique ce soit, puisqu'il n'est pas le véritable acteur ? Ce qui en nous recherche la Vérité est le vrai Soi et tout ce qu’il entreprend est efficace. Les enseignants qui soutiennent l‘assertion 3 nous disent en fait "mon enseignement ne sert à rien" et ils ont raison sur ce point ».
Je comprends ce que vous dites, mais cela ne répond pas à la question concernant ce qui peut être fait (à part aller au cinéma) pour progresser dans la compréhension. Pouvez-vous expliquer ce qui peut être fait ? De même, il serait merveilleux d'être en présence de mon gourou, comme vous l'avez suggéré, et j'ai bien compris que la transmission ne pouvait avoir lieu par ce moyen, mais comment faire s'il/elle n'est pas encore apparu(e) dans ma vie ? Je fais de temps à autres l’expérience de la paix que procure l'arrêt de la pensée, mais la plupart du temps je suis en proie à la souffrance et ne sais pas comment retrouver cette tranquillité. Ai-je le choix ? Que puis-je faire sinon attendre ?

Lorsque vous êtes effectivement dans la paix et la béatitude, il est vrai qu'il n'y a alors rien à faire. Mais regardons les choses en face : si vous souffrez, c'est parce que vous êtes dans l'ignorance, quelque révélateurs et apaisants que soient ces moments fugitifs de clarté que vous ne savez comment retrouver.

Dans cette ignorance, vous croyez être un individu, le penseur de vos pensées et l’auteur de vos actes. Dans le droit fil de cette croyance, vous pouvez et devriez essayer de penser et d'agir de manière juste : mener l’investigation sur le Soi, méditer, rechercher la Vérité par tous les moyens à votre disposition.

Imaginez un détective qui ne voudrait pas enquêter sur un cas difficile, ou qui restreindrait de manière drastique le champ de ses investigations, en négligeant par exemple d'interroger les témoins parce qu'ils pourraient ne pas être fiables, ou de lire un rapport médico-légal parce qu'il le trouve trop intellectuel. Quelles seraient ses chances de résoudre l'affaire ?

Beaucoup de chercheurs en proie à l’ignorance se comportent comme ce détective : soit ils interrompent la recherche parce qu'ils ont entendu dire qu'ils ne sont pas l’auteur véritable de leurs actes, bien qu'en fait ils croient encore être un individu capable d’action - croyance qui est à la racine de leur souffrance ; soit ils évitent de rechercher un maître par peur qu’il ne les dévoie ; ou encore renoncent-ils à l'usage de la raison en vue de leur libération parce qu’ils restent attachés à l'idée fausse selon laquelle la pensée serait l'ennemie de la Vérité.

Que peut-on faire sinon attendre ? Tout ce qui nous paraît possible.
Enquêter, méditer, rechercher le soutien et la compagnie d'un enseignant qui parle à notre cœur et à notre intelligence. Faire de notre recherche de la Vérité la priorité essentielle de notre vie. Conduire cette recherche partout et sans relâche. Essayer de vivre en accord avec cette Vérité, de vivre dans la beauté : rechercher dans nos amis la beauté intérieure, s’entourer de belles choses, lire de beaux livres, écouter de la belle musique. Prendre notre sens du bonheur comme guide. Être attentif au bonheur d’autrui comme au nôtre propre…

Vous me demandez que faire, alors que je vois tellement de choses à faire que je ne sais par laquelle commencer. Quand vous aimez, vous ne comptez pas ; vous achetez un billet pour le premier avion en partance vers votre bien-aimé, quel qu’en soit le prix. Tombez amoureuse.

jeudi 28 avril 2011

Un fonctionnement sans intervention

Extrait de « Transmettre la Lumière »
de Jean Klein

Entretien à Londres, 1989


Docteur Klein, pouvez-vous nous parler de l'état physiologique du corps quand on se trouve dans l'écoute? Quand l'objet revient à la vision, sommes-nous dans une détente profonde ?

Le corps doit être complètement libre de toute anticipation et de toute attente, libre de tout relent de passé. Il doit être complètement détendu. Aussi, pour parvenir à une compréhension, à une expérience d'écoute, nous devons d'abord prendre notre corps comme un objet d'observation. Au moment où nous prenons notre corps comme un objet d'observation, nous voyons que nous n'avons connaissance que de certaines parties de notre corps et qu'il peut être extrêmement ardu de percevoir la totalité de notre corps. Dans ces parties, il y a contraction, lourdeur et réaction. Aussi au moment où notre corps devient un objet d'observation innocente - et par innocente je veux dire que l'observateur est libre de toute attente, libre de toute mémoire - alors, dans cette observation innocente il n'y a nulle place pour un «je», pour un «moi», qui sont à l'origine des réactions et de la lourdeur. Il n'existe plus désormais de complice pour maintenir des contractions dans le corps et elles disparaissent. Nous parvenons ensuite à un ressenti global de notre corps, une sensation de vacuité. Ce que nous appelons observation inconditionnée, regard innocent, concerne un corps affranchi de toute impulsion de prendre, de saisir.

Quand nous écoutons réellement, sommes-nous libre de toute tension ?

Oui, dans cette écoute du corps, toute tension s'évanouit et nous parvenons à un corps inconditionné. Vous vous libérez de tous les résidus du passé. Dans l'observation innocente, il y a acquiescement. Vous ne pouvez jamais observer quelque chose, quand vous ne l'acceptez pas ; il doit donc y avoir, en premier, acceptation. En acceptant votre souffrance, votre souffrance se modifie. Seul un objet peut éprouver de la souffrance, et vous n'êtes pas l'objet, vous en êtes l'observateur. Je ne dis pas qu'il n'y a pas de souffrance mais elle est réduite à son aspect le plus simple, le plus fonctionnel. Quand vous résistez psychologiquement, vous êtes un complice de la souffrance. C'est seulement en acceptant que le corps se prend en charge, parce que l'origine du corps est la santé, l'origine du corps est la perfection.

Docteur Klein, pouvez-vous dire quelque chose à propos de tout ce que nous voyons comme une projection ?

Généralement nous pensons qu'un objet existe hors de nous-même, qu'il a une existence indépendante, mais c'est seulement une croyance. Ce n'est basé ni sur une expérience ni sur un fait. Le prétendu objet qui serait à l'extérieur de nous a besoin de la conscience pour être perçu. La conscience et son objet ne font qu'un. C'est vous qui créez, projetez le monde d'instant en instant. Quand le corps s'éveille le matin, au même instant le monde s'éveille. Vous projetez le monde ; c'est bien vous qui créez le monde d'instant en instant.

Est-ce que vous voulez dire que l'action crée le monde tel que nous le voyons, de telle sorte que lorsque je m'éveille le matin et que je vois la chambre et ce qui s'y trouve, la chambre existe seulement quand je m'éveille ?

D'abord, quand vous vous éveillez, vous ne voyez pas la chambre, vous ne voyez que votre mémoire. Vous voyez un angle du plafond et vous dites : «Je suis dans une chambre», mais c'est seulement la mémoire que vous projetez et que vous appelez chambre. Votre vision n'est que fragmentaire. Ce que vous nommez votre environnement est constitué par au moins 80% de mémoire. Quand votre écoute est globale, chaque instant est neuf, sinon il ne s'agit que de répétition. Aussi longtemps que durera le réflexe de vous prendre pour quelqu'un, vous ne verrez que des fragments, et le regard que vous porterez sur votre environnement ne pourra être que fragmentaire. C'est la vision fragmentaire qui crée un problème; sinon il n'y a pas de problème. C'est vous seul qui créez le problème.

Est-ce que cela veut dire que toute relation sera entachée d'un problème ?

Absolument. (Rire)
Parce qu'une véritable relation est une non-relation. Par non-relation, j'entends: «Etre libre d'être quelqu'un». Quand vous vous prenez pour une personne, vous ne pouvez voir qu'une personne. Mais quand vous vivez dans l'absence de tout ego, vous ne pourrez voir chez autrui, que l'absence de la personne. C'est dans cette non-relation que se trouve la véritable relation ; sinon, il n'y a qu'une relation d'objet à objet, de personne à personne, et c'est une source de conflit. Quand vous vous prenez pour une personne, vous vivez dans l'insécurité, étant donné que cela demande un effort pour maintenir en vie la personne, car la personne ne peut exister en dehors de situations: elle est constamment en défense contre l'absence de situations. Enormément d'énergie est gaspillée dans la création de situations, c'est-à-dire dans la création d'une fausse continuité.

Comment se débarrasser de la personne ?

Voyez que vous vous prenez pour quelqu'un.

Voir est très facile, mais s'en débarrasser est très difficile...

Voir n'est pas prendre mentalement note, cela implique que vous voyiez avec autre chose que votre seule pensée, que vous constatiez comment la vision agit sur vous. Vous devez donner du temps à la vision. Après avoir pris note, ne vous précipitez pas, mais habitez la vision assez longtemps pour prendre conscience de la manière dont elle a agi sur vous. Quand vous voyez que pendant quarante-deux ans vous avez créé une personne et que tout ce qui gravite autour de vous a été vu selon l'optique d'une personne de quarante-deux ans, il se produit un choc. Prenez note de ce choc. Il est considérable. C'est en le percevant réellement qu'il y a transformation. C'est seulement cette sorte de vision qui possède le pouvoir de transformer. Sinon il n'y a que changement, et le changement n'est pas une transmutation. Voir réellement quelque chose est une transmutation. C'est une sorte de réorchestration de toute votre énergie. Ensuite vous serez libre un jour de la personne, et là, dans votre absence, se trouve la joie seule

Ainsi donc, si nous ne percevons pas véritablement quelque chose dans notre corps, cela signifie que nous ne l'avons pas vu ?

Précisément.

Il est évident pour moi que jusqu'alors, voir n'a été qu'une idée, mais le moyen de savoir que nous avons vu c'est quand il y a cette perception dans le corps lui-même...

Oui, cela doit être perçu. Le perçu est senti, ce n'est pas un concept.

Quand les perceptions directes demeurent intellectuelles, que l'on pense: «Je la vois, je la sens», mais que cette manifestation ne se passe pas sur le plan global du corps, comment faire pour ramener la perception directe au niveau global ? Comment faire pour réellement sentir quelque chose si les nombreuses perceptions directes que nous avons demeurent plus ou moins dans la pensée ?

Je dirais que vous devez attendre, attendre que le connu se soit complètement résorbé dans la non-connaissance. Si, pour comprendre un objet, vous regardez un autre objet, le savoir reste dans le domaine du déjà connu. Mais quand vous posez la question: «Qui suis-je? Quelle est ma vraie nature ?», toute représentation doit s'être déjà complètement dissoute dans l'être.

Ainsi nous pouvons nous dire: «J'ai eu une perception directe, mais elle n'a pas changé ma vie, elle est purement intellectuelle», et ensuite nous devons revenir à cette perception physique, au lâcher-prise et à la détente ?

Oui, quand vous disposez d'une représentation globale claire, elle agit sur vous, elle agit sur la totalité de votre corps.

Comme quand on devient soudain conscient d'une tension et que la tension disparaît ?

Bien sûr, si vous allez chez un psychanalyste, il vous dira que le relèvement de l'épaule est une réaction psychologique. Mais ceci n'est qu'une explication. Pour réellement comprendre la tension, vous devez sentir votre épaule ; votre épaule doit être une sensation. Vous écoutez la sensation et vous observerez alors que votre épaule tombe, de plus en plus bas, et finit par atteindre sa position juste. Vous verrez que lorsque votre épaule est complètement relâchée, vous serez libre de toute angoisse. Aussi n'est-il nullement nécessaire de savoir pourquoi l'épaule s'élève. Il est seulement besoin de noter le moment où elle se relève, et elle s'abaissera naturellement. C'est une expérience organique. Une fois que vous aurez expérimenté la position juste, vous en aurez la mémoire organique et aussitôt vous percevrez la différence entre une épaule relâchée et une épaule relevée. A partir du moment où vous voyez que, chaque jour, vous vous prenez pour quelqu'un, que vous vous identifiez à votre intelligence, à vos capacités, à vos talents, à votre personnalité, et que vous affrontez le monde et votre entourage du point de vue de cette personnalité - quand vous voyez réellement quel non-sens il y a de vous prendre pour quelqu'un que vous n'êtes pas réellement - alors cette personnalité disparaîtra, vous pouvez en être certain. Un jour vous serez libre de l'ego, soudainement libre; être soudainement libre de l'ego, c'est une illumination subite. Mais quand cela se produit, prenez-en note sans interpréter, sans chercher à justifier. Quand la pensée entre en jeu, vous ne pouvez jamais parvenir à une transformation; ce n'est pas la pensée qui voit, c'est la conscience. C'est un séisme extraordinaire quand vous voyez, pour un instant, que vous vous êtes pris pour M. Smith ou M. Dupond pendant quarante-deux ans, que votre personnalité est une totale fabrication, un néant, une ombre! C'est un extraordinaire séisme !

Et après, Dr Klein ?

Après cela, vous vous goûterez quelquefois vous-même dans votre absence. Vous percevrez réellement votre véritable présence dans cette absence...

Vous avez parlé du relâchement de l'épaule à titre d'exemple, et l'on observe de pareils phénomènes quand on relâche la pensée. On remarque un point où l'on se décharge d'une quantité de choses mais il y a une peur fantastique d'éliminer l'ultime petit morceau. Il y a encore le désir de connaître, et ce désir arrête cette élimination. Pourriez-vous nous parler de cela ?

Vous ne pouvez jamais séparer la pensée du corps, le corps de la pensée. La peur et l'angoisse que vous ressentez quelquefois, c'est dans votre corps-pensée que vous les percevez d'abord ; mais quand vous les sentez, vous les transposez ordinairement sur un plan conceptuel et vous dites: «Je suis dans un état de peur". Dire cela, c'est faire intervenir la mémoire, le concept de peur ; vous n'êtes pas en contact avec la sensation véritable. Aussi affranchissez-vous du concept de peur et n'ayez en face de vous que la perception, mais une perception non conditionnée, nue, débarrassée de toute anticipation, de toute attente.

«Non conditionné» semble être le mot clé. Quand il y a un désir permanent de cette réalité supérieure, ce désir fait que la perception est conditionnée, n'est-ce pas?

Oui. Essayez de trouver en vous-même cet état sans désir. Regardez comme le fait un scientifique, sans interpréter, sans comparer, sans justifier. Revenez chaque fois à cette pure perception. Nous en savons très peu sur la perception pure, parce que nous la rendons tout de suite psychologique, nous en faisons une conception. Quand je dis de la voir, cela veut dire la voir sans interprétation, d'être face à elle, à elle seule.

Vous voulez dire sans choix ?

Oui, sans choix, sans sélection.

Je veux dire, dans mon cas, qui choisit de venir ici au lieu d'aller au cinéma ?

Je n'en suis pas si sûr! ( Rire )

Moi non plus !

J'aimerais que vous scrutiez plus attentivement ce qui vous pousse à venir ici. Regarder la motivation qui vous conduit à venir ici peut considérablement réduire votre consommation d'essence ! Vous pouvez faire face à la question immédiatement, dans votre salon. Peut-être est-ce un manque de paix, un manque de bonheur. Si c'est un manque de paix, peut-être pouvez-vous affronter, dans l'instant même, la sensation qui vous rend nerveux. Faites face à la perception à ce moment-là, faites face à l'absence de paix et de bonheur, et vous vous découvrirez vous-même, non dans l'objet, le manque ou la nervosité, mais dans la vision elle-même.
Vous êtes le sujet ultime, le sujet de tous les objets. Des milliers et des milliers d'objets existent et changent, mais vous êtes l'unique sujet ultime qui ne peut jamais devenir un objet - aussi, soyez-le ; c'est là qu'est votre liberté. Quand vous verrez cela réellement, vous serez frappé par l'évidence qu'il n'y a rien à atteindre, rien à acquérir. Si quelqu'un vous déclare que vous pouvez apprendre quelque chose ou obtenir une perception directe grâce à une technique ou un système, passez votre chemin. Tout cela vous détourne de la vision réelle. Rien n'est à acquérir de ce que vous êtes, parce que vous l'êtes. Tenter de l'acquérir vous en éloigne, car c'est ce qu'il existe de plus proche de vous. Avant que votre corps ne s'éveille le matin, vous l'êtes. Il est suffisant de savoir que les états de veille, de rêve, de sommeil profond sont en vous. Ce qui est derrière tous ces états est votre vraie nature, votre vrai visage;  c'est le visage même que vous aviez avant votre naissance, et c'est le visage même qui demeure après votre mort physique. Mais l'important est d'intégrer cela sciemment.

Je ne connais pas ce moment dont vous parlez, avant que la pensée ne s'éveille. Je sens que je vais d'un sommeil profond ou d'un état de rêve inconscient à un état de veille «normal».

Il est des moments où le corps n'est pas totalement corps, où le monde n'est pas complètement monde, aussi restez dans cet effluve de sommeil profond, soyez complètement à l'unisson avec lui. Ne forcez pas votre corps-pensée à travailler ou à s'éveiller, ne forcez pas le monde à être monde. Vous découvrirez, quand vous ferez réellement cela, que la totalité de votre journée conservera le parfum du sujet ultime que vous êtes.

Donc, toute la question est de demeurer avec ce parfum avant que le corps-pensée ne s'éveille ?

Oui, mais vous ne pouvez faire intervenir la volonté. Au moment où vous la percevez, restez complètement accordé à cette sensation; vous ne pouvez jamais la garder, c'est elle qui vous garde.

Dr Klein, comment peut-on s'acquitter de ses tâches quotidiennes s'il n'existe ni personnalité ni ego ?

C'est dans votre absence que vous percevrez votre réelle présence. Tout ce qui apparaît dans votre vie est comme ce qui se produit sur une scène mais vous ne vous identifiez pas à l'acteur qui est sur scène, vous demeurez simplement dans la salle, vous êtes le témoin. La vraie joie n'a lieu que lorsque vous êtes le témoin de tout ce qui apparaît et disparaît. Alors vos relations changeront complètement, parce qu'alors il n'existe aucune personnalité à laquelle vous identifier. La personnalité est un très bon outil, mais vous ne vous identifiez pas à elle. Vous agissez spontanément, et cette action n'est pas une réaction, elle est en réelle adéquation avec chaque instant. Une action spontanée implique qu'il n'y a ni acteur, ni agent, il y a seulement action. Il n'y a aucune entité dans le cosmos, il y a seulement fonctionnement. Un fonctionnement sans intervention d'une personnalité relève d'un âge nouveau.

mercredi 27 avril 2011

Le renard handicapé

 Extrait de « Comme un chant d’oiseau »
d'Anthony De Mello



Une fable du mystique arabe Sa'di.

Un homme qui se promenait dans la forêt aperçut un renard qui avait perdu ses pattes et il se demanda comment il pouvait survivre ainsi.
A ce moment-là, il vit survenir un tigre avec une proie dans la gueule.
Le tigre mangea tout son soûl et abandonna le reste de la viande au renard.
Le jour suivant, Dieu nourrit le renard par le truchement du même tigre.
L'homme commença à s'émerveiller de la grande bonté de Dieu et se dit :
"Moi aussi, je vais tout simplement m'installer dans un coin, en me fiant totalement à Dieu, et il me procurera tout ce dont j'ai besoin."
Ce qu'il fit pendant un mois, sans que rien ne se produise.
Et le pauvre bonhomme était pratiquement à l'article de la mort quand il entendit une voix lui dire :
"O toi, qui es sur le chemin de l'erreur, ouvre les yeux à la vérité !
Suis l'exemple du tigre et cesse d'imiter le renard handicapé !"

mardi 26 avril 2011

Tous les chemins sont Rome

Article du site « Propos sur la non-dualité et l'unicité absolue » de Monko


"Le Christ peut mille fois naître à Bethléem, s'il ne naît pas en toi tu demeures perdu pour l'éternité" (A. Silesius)

"Jésus est né à Bethléem, mais le Christ naît en moi, à chanque instant, encore et encore et encore, jusqu'à ce qu'Il devienne moi et que je devienne Lui. Alors, il nous faut encore nous perdre l'un pour l'autre, l'un et l'autre, nous oublier, afin que cette perte bienheureuse qui se sait être soit naturellement rendue, pour l'éternité à l'éternité, à la Totalité".

A la fin, à la fin d'un voyage qui n'a jamais eu lieu mais qu'il faut entreprendre avec passion, toute différence entre soi et non-soi disparaît, (distinction qui n'a jamais existé), pour laisser place à la majesté tranquille, naturelle, banale mais ô combien vibrante et merveilleuse de ce qui est. A la fin, le spectateur illusoire quitte la scène, et seule la scène demeure, vivante, et qui prend le nom de Soi.

Bien sûr, Cela ne se trouve pas au bout du voyage, mais est ce qui affleure au sein de cette apparence appelée voyage et qui cogne, bouscule et irradie sans cesse le voyageur, chimérique, mais si puissant. Le voyage, le voyageur et le but, qui sont tous trois Un, et Une chimère, sont une allégorie à propos du fait que cette "trinité" est sans substance mais est elle-même le Soi, une sorte de trois-en-un, d'Un en tant que trois. Voilà pourquoi ce voyage, sans réelle existence mais absolument précieux ne peut être balayé d'un revers de la main, voilà pourquoi chaque apparent chemin ou cheminement, s'ils se présentent, doivent être laissés à leur déploiement avec intensité.
La Voie, c'est ce qui est là, ce qui se présente.

Ce chemin peut avoir pour manifestation l'investigation du Soi où la question "qui suis-je ?"  est investie, elle peut être une approche dévotionnelle, où l'amoureux se donne totalement à son bien-aimé jusqu'à ce qu'ils se trouvent et se perdent l'un pour l'autre pour ne laisser briller que la majesté de l'Un, ce peut être une approche méditative et silencieuse, comme dans certaines voies zen par exemple, ce peut être la voie contemplative, silencieuse de certains ordres monastiques, ce peut être une approche plus sensorielle, comme la voie du yogi, cachemirien ou pas, etc, etc...
Tous ces chemins ne mènent pas à Rome car ils SONT Rome (même si parfois la cité a l'apparence d'un village désertique!). Et cela se traduit par le fait de s'investir dans le christianisme, le soufisme, le zen, l'advaïta, le chamanisme, mais aussi la philosophie, l'art, la physique quantique, également les échecs, la pêche à la ligne, etc... Tout ceci est absolument sans importance mais infiniment précieux. Et tout ceci sera quitté, en substance. Tout ceci n'est autre que le Soi et tout ceci "contient" donc sa propre transcendance, sa propre fin, en tant que réalité, que substance. Donc, rien ne s'est passé, l'ignorance a simplement disparue et la connaissance brille, sans que rien ni personne ne soit changé, car il ne fut jamais rien d'autre que l'Essence, en tant que voilée, masquée, et en tant que dévoilée.

Néanmoins, peut-être untel ou unetelle restera chrétien, soufie, moine zen, yogi ou quoi que ce soit. Mais cet aspect sera juste célébratif, ou fonctionnel et culturel, sans qu'il ne soit investi psychologiquement, revendiqué et que rien ne soit cherché à travers cela. "Je suis chrétien", dira-t-il au fond d'un sourire... Et il s'en dégagera une vraie liberté, une vraie beauté.
Une paix heureuse, un amour sont alors le coeur de toute expérience, de tout état, du cirque cosmique...

lundi 25 avril 2011

Unicité et Dualité

Extrait de « Tout est conscience » de Ramesh Balsekar

L'unicité et la dualité du noumène et des phénomènes

Noumène et phénomènes, énergie potentielle et énergie active, pensée et action sont essentiellement Un dans l'Unicité et n'existent que dans la phénoménalité.

L'océan demeure le même, qu'il y ait ou non des vagues à sa surface.
C'est comme si l'océan jouait sportivement avec les vagues.
De même pour l'énergie, quand elle souhaite se voir en action, elle active sa potentialité dans l'actualisation de la vie phénoménale, mais essentiellement il n'y a pas deux.
Il y a seulement énergie, potentielle ou active.
Le noumène non-manifesté, dans une explosion d'énergie et d'amour, devient la manifestation phénoménale - la vie telle que nous la connaissons - mais essentiellement il n'y a qu'Unicité.
Quand le jeu de l'amour s'est épuisé, les phénomènes manifestés retournent au noumène non manifesté dans l'Unicité.

Même dire que noumène et phénomènes, Nirvana et Samsara sont Un serait leur reconnaître une dualité. En vérité ils sont simplement deux aspects de l'Unicité fondamentale, exprimés dans la dualité afin que puisse naître une compréhension de cette Unicité fondamentale. Quand ce concept de dualité est abandonné, il ne reste plus que la vérité de l'Unicité.
Maya est le premier concept de l'Unicité s'exprimant dans son aspect duel, non-manifesté et manifesté. Et c'est le miracle de la maya que l'Un non manifesté se présente sous l'aspect multiforme des phénomènes tandis que l'Unicité originelle demeure intacte et indivisée.
La conscience non consciente d'elle-même devient soudainement consciente d'elle-même, et à cet instant naît l'univers et son infinie diversité. La Conscience est immanente en chaque atome et sub-atome et, merveille des merveilles, elle transcende en même temps la manifestation et tout son contenu.
Noumène et phénomènes - non-manifesté et manifesté - sont Un en essence.
Un, qui s'est scindé de son propre fait en un mirage dans le seul but de goûter cette dualité par la vie et le jeu de vivre.
De même qu'il peut y avoir deux instruments de musiques (ou plus) et un seul son, deux lampes (ou plus) et une même lumière, deux yeux mais une seule vision, la manifestation entière n'est rien d'autre que l'expression du noumène.
Au terme de cette expression, quand l'énergie active s'est épuisée, la manifestation entière retourne au non manifesté.
"Telle l’araignée qui exprime son fil à partir de sa propre bouche, joue ensuite avec lui, pour enfin le n'absorber en elle, le Seigneur immuable, sans forme, sans attributs, connaissance et félicité absolue, tire l'univers entier de Lui-même, s'en amuse pour un temps, et pour finir le redissout en Lui-même. (Bhagvatam)

dimanche 24 avril 2011

Je vois que je suis cela qui regarde

Dialogue avec Tony Parsons
Vu sur le site "Vent d'Eveil"


Qu'est-ce que vous diriez à propos du choix ?

Quand l'éveil se produit, il est clair qu'il n'y a jamais eu personne pour l'atteindre. Il est également reconnu que tout au long de la vie apparemment "menée" auparavant, il n'y a jamais eu "quelqu'un qui choisissait" ou "quelqu'un qui faisait" quoi que ce soit. Tout ce qui est arrivé, du plus infime pet de lapin à ce qui paraissait être la décision la plus capitale, n'aurait jamais pu être autre en quelque façon que ce soit.

Il n’y a donc ni bien ni mal à faire quoi que ce soit ?

Il n'est plus question de bien ou de mal. Ce qui est vu, c'est que l'apparente entité séparée n'est qu'un personnage rêvé dans un roman, et vécu par l'énergie divine, qui est tout ce qui est. Cette apparente entité séparée semble posséder certaines prédispositions et caractéristiques, et ses choix apparents sont induits par le conditionnement et l'histoire de ce personnage entièrement vécu par le souffle de la vie.

Alors qu'en est-il du libre arbitre ?

Il n'est aucunement question de l'existence d'un libre arbitre, simplement parce pour commencer il n'y a personne là pour posséder une volonté ou exercer un choix quelconque. Demandez-vous d'où proviennent les pensées et, si vous êtes vigilant, au bout d'un certain temps, vous vous apercevrez qu'elles ne sont pas vôtres. Elles émergent, apparemment de nulle part, se produisent, durent un moment et ensuite s'estompent pour disparaître complètement. Vous n'êtes pour rien dans leur origine.

Je pourrais donc aussi bien rester ici à ne rien faire.

En fait, c'est encore un autre choix apparent. Vous ne pouvez vous empêcher de respirer et vous ne pourrez rien faire contre le fait à un moment donné de vous lever et de sortir de cette pièce. Tout est simplement en train de se produire constamment à travers vous. Un formidable soulagement se fait jour dès que cette réalisation est acceptée ; toute culpabilité tombe, il n'y a plus de regrets, et ce qui est vu, c'est que vous avez été amené à vous asseoir ici pour entendre précisément cela. Se débattre et lutter sans trêve peut enfin cesser et l'effort déployé pour faire " fonctionner" sa vie perd d'un coup tout attrait. Se détendre et permettre à la vie de s'écouler à son propre rythme ouvre vers une autre possibilité.

Mais comment est-ce que je paye mes hypothèques ?

Cela n'a pas besoin d'être un problème. La manière dont le corps/mental fonctionne se poursuit tout simplement. Rien ne change apparemment, mais tout est transformé. De la créativité spontanée, dénuée de peur, peut surgir une profonde harmonie avec le quotidien. Mais cela doit toujours être une considération secondaire et n'est jamais garanti.

Mais comment savoir ce qui est bon ou mauvais pour moi et ceux que j'aime ?

Vous ne le saurez pas et d'ailleurs ne l'avez jamais su. Soyez ouverts à l'idée de vivre le reste de votre vie dans le chaos, abandonnez-vous au fait de n'avoir plus à connaître quoi que ce soit. C'est merveilleux.

Vous ne pouvez suivre que ce qui vous semble évident. Votre travail, vos relations, etc., tout cela a une certaine caractéristique, engendrée à travers vous par la conscience. Le déroulement de votre vie s'est produit exactement comme il le fallait - totalement adéquat d'un bout à l'autre. Cela va continuer et rien de ce que vous ferez ne sera ni bien ni mal, ce sera simplement" ce qui est". Alors, détendez-vous donc et laissez tout cela se produire, parce que de toute façon cela va arriver. Le soulagement, c'est d'abandonner cette apparente voix intérieure, qui vous dicte comment vous devriez être ou agir. Laissez-la tomber tout de suite, ici même. C'est un leurre qui rie fait qu'obstruer le chemin.

En ce qui concerne ceux que vous aimez, vous ne pouvez vivre qu'au travers de ce que vous comprenez. Vous n'avez aucune responsabilité d'aucune sorte pour qui que ce soit ni quoi que ce soit. Il n'y a personne là, et il n'y a jamais eu personne là qui puisse prendre une responsabilité quelconque.

Etes-vous en train de dire que nous n'avons de responsabilité pour rien ?

Qu'est-ce que vous en pensez ?

Je crois avoir participé à la création de ma fille et par conséquent devoir l'aider à vivre dans le monde du mieux qu'elle le peut.

C'est probablement tout ce que vous pouvez faire pour le moment, mais comment avez-vous participé à sa création ?

J'ai aimé sa mère et c'est ma semence qui s'est réunie à son ovule pour commencer tout cela.

Qui a choisi de faire l'amour à la mère ?

C'est moi, bien que cela ait été probablement mutuel en ces temps-là. (rires).

D'où la pensée de lui faire l'amour est-elle venue ?

C'était plutôt comme une envie irrésistible.

Qu'est-ce qui a instigué en vous cette envie?

Quand j'y pense maintenant, ça m'a semblé, et cela me semble encore, émerger de nulle part en particulier.

Suggérons alors, si vous le permettez, que la conception s'est produite totalement en dehors de votre volonté - cela c'est simplement produit.

Peut-être, c'est possible.

Donc où était, où est, ce désir que vous avez remarqué au début?

Une sorte de vibration commence dans mon corps, suivie par la pensée " j'aimerais faire l'amour ".

Et quelle en est l'origine?

Je ne sais pas vraiment.

Alors qui la reçoit et en prend la responsabilité ?

C'est moi.

Quelle partie de vous-même?

Eh bien, mon corps et ensuite ma pensée.

Et laquelle de ces choses-là est vous-même ?

C'est un amalgame de ces deux choses.

Donc vous êtes un mélange de différentes pulsions et pensées ?

Ça me paraît être ça.

Et de quoi êtes-vous conscient tout de suite ?

D'une excitation joyeuse.

Êtes-vous cette excitation ? (longue pause)

Non, c’est bon, j'ai compris à présent.

Compris quoi ?

Je vois que je suis cela qui regarde cette excitation se produire.

samedi 23 avril 2011

Les manifestations sont inertes

Extraits de « La Voie directe : s'identifier à la conscience pure»
de Greg Goode


Pages 27 - 28

À part apparaître et disparaître, les manifestations ne font rien, en fait.
Elles n'ont pas de pouvoir causal.
La raison supérieure a établi que les manifestations ne sont pas des objets physiques ou mentaux, parce que les choses physiques ou mentales n'ont pas plus de substance que les manifestations dans la conscience témoin.
En tant que choses qui vont et viennent, les manifestations sont spontanées et indépendantes les unes des autres. Elles n'ont pas le pouvoir de faire quoi que ce soit. Elles ne sont pas contenues  l'une dans l'autre. Elles ne se causent pas l'une l'autre. Elles ne se voient pas, elles ne se réfèrent pas les unes aux autres.
Elles ne se touchent pas.
Jamais on ne fait l'expérience de la survenue de ces actions.
On croit seulement qu’elles surviennent.
Mais les croyances ne sont elles-mêmes que des pensées, qui ne sont rien d'autre que des manifestations.
En fait, toutes ces relations, telles que contenir, causer, voir, se référer ou toucher, ne sont elles-mêmes rien d'autre que des manifestations.
Et toutes apparaissent et disparaissent dans la conscience témoin.
Parfois il semble presque irrésistible de faire un parallèle entre les manifestations dans la conscience pure et les pensées dans l’esprit.
On peut donc avoir l'impression que certaines manifestations apparaissent beaucoup trop souvent ou bien qu'elles servent à en déclencher d'autres.
Mais les manifestations n'ont par elles-mêmes aucun pouvoir.
Elles n'ont donc pas la capacité d'aller en coulisses et de mettre au point un plan d'action.
Elles ne se cachent pas quelque part pour revenir ensuite.
Quand elles ne sont pas présentes, elles ne sont pas autre part.
Quand on a l'impression que certaines d'entre elles produisent l'apparition d'autres, cela se passe plutôt ainsi :
1. La manifestation A apparaît et disparaît.
2. La manifestation B apparaît et disparaît.
3. La manifestation C apparaît et disparaît.
4. La manifestation D apparaît et semble dire : " La manifestation A était un déclencheur, parce qu'après être apparue, elle a produit l'apparition de B et de C."
Mais remarquez que cette revendication en D est elle-même une manifestation.
Et au moment où D apparaît, A, B, et C ne sont plus visibles.
Il n'y a aucune preuve actuelle qu'elles se sont jamais produites...

vendredi 22 avril 2011

Le sentiment d'injustice

Extrait audio d'un dialogue avec Francis Lucille
lors de la retraite à Paris de l'hiver 2010


Francis explique qu'au niveau absolu, il n'y a pas d'injustice. Au niveau relatif, il y a harmonie ou ignorance. L'indignation est une forme de colère impersonnelle. Il illustre par une anecdote à propos de Jean Klein, dans un moment où il exprimait sa réprobation.

Extrait audio français avec traduction en anglais - durée : 8 minutes
Cliquez sur le bouton vert pour lancer l'écoute.

jeudi 21 avril 2011

La Grâce

Extrait de « Perles du coeur d'Amma » d'Amma


Question : Amma, la grâce est-elle le facteur décisif ?
La grâce est le facteur qui amène le résultat juste, au moment juste, à la juste mesure de vos actions.
Même si l’on se consacre totalement à son travail, le résultat dépend-il de la grâce que nous recevons ?
L'essentiel est de s'y consacrer totalement.
Plus vous vous donnez, plus vous demeurez ouvert.
Plus vous êtes ouvert, plus vous ressentez l'amour.
Plus vous avez d'amour, plus vous recevez de grâce.
La grâce, c'est le fait d'être ouvert.
C'est la force spirituelle et la vision intuitive dont vous pouvez faire l'expérience au moment d'agir. Face à une situation donnée, rester ouvert, c'est lâcher l'ego et les idées étriquées. Cela transforme votre mental et en fait un meilleur canal de la shakti (l'énergie divine) qui coule alors à travers lui. Ce flot de la shakti, le fait qu'elle s'exprime au travers de vos actions, c'est cela, la grâce.
Prenez le cas d'un chanteur. Il s'agit peut-être d'un chanteur prodigieux mais, quand il est sur scène, il doit permettre à la shakti de la musique de s'écouler à travers lui. Cela attire la grâce et l'aide à transporter son public.
Où se trouve la source de la grâce ?
La source réelle de la grâce est à l'intérieur.
Mais tant qu'on n'en a pas conscience, elle semble demeurer quelque part au loin, dans l'au-delà.
Dans l'au-delà ?
L'au-delà signifie l'origine qui, dans votre état de conscience actuelle, vous demeure inconnue.
Quand un chanteur chante avec le cœur, il est en contact avec le divin, avec ce qui est au-delà. D'où vient cette musique qui touche l'âme ? Vous répondrez peut-être qu'elle vient de la gorge ou du cœur. Mais si vous regardez à l'intérieur, la verrez-vous ? Non ; donc, elle vient de- l'au-delà.
Cette source, c'est bien le divin.
Une fois que cette prise de conscience ultime se sera produite en vous, vous trouverez cette source à l'intérieur.

mercredi 20 avril 2011

Dé-couvrir la paix heureuse

Article de Francis Lucille
publié dans le n° 79 de la revue 3eme Millénaire


Quelle direction offrir à un chercheur ? Quel est l'axe essentiel selon ton expérience ?

La recherche est la recherche de la paix heureuse.
Celle-ci est le fond même de notre être.
Elle n'a pas à être créée ou recréée.
Elle a à être dé-couverte... et ce qui la couvre est un réseau de croyances que nous avons adoptées de nos parents, de notre milieu, de notre civilisation, qui tourne autour de la notion d'être un individu séparé. Si nous conduisons une investigation de ces moments au cours desquels nous avons un sentiment de manque, de misère, d'insatisfaction, de peur, de frustration, elle nous amènera toujours à cette notion d'identité séparée. La question qui se pose dès lors est : quelle est la nature de cette entité séparée ? Que suis-je ?
Je ne suis pas le corps, ni les pensées qui se présentent, mais je suis la conscience à laquelle le monde, le corps, les pensées se présentent. Cela est ma nature.

Le conditionnement socioculturel m'a amené à croire que cette conscience est personnelle. En fait, dans l'univers physique, rien n'est séparé : tout est lié. Dans l'univers subtil, le monde des idées, de l'information, il en va de même. Les idées ne sont la propriété de personne, elles circulent.
L’internet humain a existé bien avant l'internet informatique. Les idées sont non-locales. Là non plus, pas de séparation. Si au niveau physique comme au niveau informationnel, il n'y a pas de séparation, pourquoi y aurait-il séparation au niveau de la conscience ? La séparation est simplement notre croyance qu'il y a séparation. La diversité est notre croyance qu'il y a diversité.
Cela peut sembler intellectuel, mais rien n'est moins faux, car ce qui est intellectuel est la projection du concept de diversité sur une réalité qui est "une". Lorsque les fantômes de l'ignorance s'évaporent, ce qui reste est et c'est ce que nous sommes. Dans cette connaissance de ce que nous sommes, nous éprouvons la joie et la paix.
Comme le disait mon ami Yvan Amar :
"La joie est la paix en mouvement, et la paix est la joie au repos".

Nous sommes face au fait d'être identifiés à la croyance d'être une entité séparée.
Un chercheur de vérité se demande nécessairement comment faire face à cela...

Le but est le même pour tous les chercheurs. La voie est différente pour chacun d'eux.
Le sommet est unique. Les voies vers le sommet varient selon la position de l'alpiniste au flanc de la montagne. A la question : « comment accéder au sommet ? », il n'est pas une réponse unique. C'est là que, au fond, intervient l'enseignement. Pour être efficace, l'enseignement doit être sur mesure. C'est là l'utilité de l'enseignement humain, qui permet de voir où l'élève se situe, où est le sommet et quel chemin est le plus aisé pour y accéder.
Certains chercheurs ont accumulé beaucoup d'habitudes de pensées et de croyances. La raison, qui procède de l'intelligence, et l'éclair de vérité soudain entrevu sont des instruments efficaces pour déblayer ces croyances. Mais il est également des obstacles accumulés au niveau du corps même : une façon de se sentir prisonnier du corps, des contractions, des résistances, des habitudes de mouvoir le corps, qui trahissent la frustration, la timidité, la peur. Là aussi, une démarche peut être utile dans le but de libérer le corps de la gangue des habitudes. Un premier éclair de compréhension est important, mais il n'est que le début de l'étape finale. Celle-ci est décrite de la façon suivante par le sage Krishna Menon : lorsque ni les pensées, ni les sentiments, ni les perceptions sensorielles ne vous détournent plus de votre nature profonde, le but est atteint.

Il y a souffrance et en même temps refus de cette souffrance.
Nous fuyons la situation telle qu'elle est, en nous-mêmes comme autour de nous...

La souffrance ne doit être ni fuie, ni acceptée avec résignation : elle doit être comprise. Le Bouddha l'a dit, la souffrance est un fait, et elle a une cause. La souffrance, qui est le sens de la séparation, voit sa fin quand nous comprenons que cette séparation est une illusion. C'est la base. Une fois cette base au moins entrevue, on peut s'attaquer à ces résistances, ces contractions, ces croyances, à la fois au niveau mental et au niveau corporel. Les habitudes de pensée et de sentir, établies pendant des dizaines d'années ou toute une vie, prennent un certain temps pour se déconstruire. Mais la précondition à cette déconstruction est une compréhension, une intuition profonde de ce que nous sommes. En l'absence d'une telle intuition, tout ce que nous déconstruisons sera reconstruit.
Tant que la source de l'ignorance ne s'est pas tarie, 
aucun barrage ne retiendra l'eau qui s'en écoule.

mardi 19 avril 2011

La peur spéciale

Extrait du livre « Au coeur du présent»
d'Osho


Vous avez raison d'avoir peur quand vous ne savez pas exactement de quoi il s'agit. 
Cela veut simplement dire que vous êtes au seuil de quelque chose d'inconnu.

Quand votre peur a un objet, c'est une peur ordinaire.
On a peur de la mort - c'est une peur instinctive très ordinaire ; elle n'a rien de particulier.
La peur de la vieillesse ou de la maladie sont des peurs ordinaires, communes, courantes.

La peur spéciale apparaît quand vous ne pouvez lui trouver d'objet, quand elle est là sans aucune raison. Cela vous effraie vraiment! Si vous pouvez trouver une raison, le mental est satisfait. Si vous pouvez dire pourquoi, le mental a une explication à laquelle s'accrocher.
Toutes les explications ne font qu'expliquer en repoussant le problème, c'est tout, mais une fois que vous avez une explication rationnelle, vous vous sen¬tez satisfait.

Il vaut mieux voir la chose telle qu'elle est sans demander pourquoi.
Une chose inconnue vous tracasse comme elle tracasse tout chercheur.
C'est la peur que chaque chercheur doit traverser.
Je ne suis pas là pour vous donner des explications, 
mais pour vous pousser à traverser cette peur.
Je ne suis pas un psychanalyste - je suis un existentialiste.
Mon effort est de vous rendre capable de faire autant d'expériences que possible - l'amour, la peur, la colère, l'avidité, la violence, la compassion, la méditation, la beauté etc.

Plus vous éprouverez tout cela, plus vous vous enrichirez.

lundi 18 avril 2011

Le maître spirituel

Extrait de « My Secret is Silence »
(Mon secret est le silence) d'Adyashanti
Traduction : Isabelle Padovani
Nota bene : ce livre n'a jamais été publié en français 


Quand tu viendras à lui
tu le connaîtras par la façon
dont il vole tout ce qui est sacré
dans la paume de ta main.
D’autres te promettront davantage.
Il ne te promettra rien,
même pas un miracle.

Tu te tromperas toi-même
avec ses enseignements.
Tu écouteras chaque mot
sortant de ses livres avec anticipation.
Mais pendant qu’il parle
ses yeux rient.
Tu enregistreras ses mots
et tu les réécouteras.
Tu les liras encore et encore,
cherchant leur signification secrète.

Mais sa vraie voix se dérobera à toi
parce que tu cherches
et tu n’écoutes pas.
Tu cherches
et tu n’écoutes pas.
Tu cherches
et tu n’écoutes pas.

dimanche 17 avril 2011

Observance

Article du site « Propos sur la non-dualité et l'unicité absolue » de Monko


Là, en ce moment, une confusion perturbe la tranquilité que je croyais être depuis qq temps ; elle est consécutive à une situation récente qui est venue révéler un comportement que je croyais révolu à savoir voir la souffrance des autres et oublier la mienne, puis avoir un comportement de Calimero, parce que je me suis oubliée et que je n'ai pas su m'imposer. Enfantin, me diras-tu ? Oui, je le reconnais. Je navigue, selon les heures de la journée, entre le jugement et l'acceptation de ce comportement, avec une nette préférence pour la flagellation.
Pour le moment, j'ai des difficultés à penser que cette expérience et le mal-être dans lequel je suis, est incluse dans le Soi. Je te disais, il n'y a pas si longtemps que "tout est ok", la joie, la tristesse, les bla bla..., par conséquent, Caliméro est aussi ok. Mais je ne comprends pas ce qui bloque la fluidité de ce qui est !!!!

Bonsoir,
Je pense qu'il faut signaler en un premier temps que ce qui peut être perturbé n'est pas vraiment ce que nous sommes : ce que nous croyons chercher peut-être, ce que nous croyons pouvoir obtenir, ce que nous croyons obtenir, et qui ne sont que des états que nous prenons pour substantiels.
C'est là le noeud du problème : tous les états sont bienvenus, de la clarté à la confusion, mais étant pris pour substantiels et personnels, ils sont maintenus ou fuis à grands coups de tensions, et la vie se charge de mettre tout sens dessus dessous.
Nous pensons que les états sont "quelque chose", que les autres, le corps et le monde sont "quelque chose", vus, expérimentés et accueillis par "autre chose": Soi, le Percevant.
Réaliser le Soi, en-dehors de tout phénomène ou état, réaliser Dieu est bien évidemment une chose merveilleuse, rare, (mais qui arrive de plus en plus j'ose le croire), qui apporte paix et amour... Mais en réalité, c'est l'ultime illusion, car une fois qu'on a trouvé Dieu faut-il encore l'ultime grâce et courage de l'abandonner.
Ainsi, ce "Rien" qu'il est, l'Essence, va simplement se translater et devenir, de manière infiniment vivante, l'essence de Tout.
Et ainsi, Tout = Rien, corps = Soi, monde = Soi, états = Soi, percevant = perçu...
Ce qui a simplement disparu, c'est cette petite voix/tension qui sépare tout, qu'on appelle l'ego, illusoire. Rien n'a de substance car tout est l'Essence.
Alors, ce qu'il se passe, est que les états continuent de se présenter: parfois une tranquilité, parfois une activité, parfois une colère, parfois une tristesse, parfois une confusion, même s'il y a une tendance à ce qu'énergétiquement parlant, tout cela ne se situe plus dans des extrêmes, mais nos conditionnements sont tels (et ils ne sont que SES conditionnements) que rien n'est obligatoire.
Il ne s'agit donc plus d'intégrer un "autre état", supérieur, auquel s'accrocher et demeurer dans la béatitude. En un sens, tous les états deviennent UN seul état, à la fois permanent et sans cesse changeant.
Le comportement que tu me cites n'a ni à être jugé, ni à être accepté.
Si l'acceptation surgit, c'est parfait, et cela traîne avec elle une certaine saveur qui imprègne notre structure d'une certaine manière. Si le jugement apparaît, c'est également parfait, car il vient lui aussi avec son parfum, en général trouble, mâtiné d'insatisfaction, laquelle est l'acceptation ou la tranquillité qui se cherchent. Ce qui peut à un moment être clair, c'est qu'il n'y a ni juge ni accepteur.
La situation n'apparaît pas dans le Soi, elle EST le Soi.
La conscience de cette situation est le Soi, le jugement ou l'acceptation SONT le Soi. Et Calimero aussi. Tant que nous pensons que tout cela apparaît dans le Soi, nous cherchons autre chose que ce qui est. Et c'est parfait, c'est une parfaite invitation. Tant que c'est ce qui est cru, c'est cette recherche qui doit s'effectuer. Mais il faudra bien se rendre compte à un moment qu'abandonner le perçu, c'est abandonner le percevant.
Il n'y a donc plus d'observateur, d'observé ou d'observation, mais une infinie "Observance", sans temps ni espace, sans distance ni durée.
Il ne s'agit pas de se purifier et d'évacuer ses comportements; il faut être percuté par l'évidence que nos comportements sont SES comportements, et la magie opère : l'illusion d'un "comporteur" se consume, d'un responsable ou d'un coupable.
Probablement certains rééquilibrages voir révolutions dans l'aspect énergétique et intellectuel de notre structure vont se manifester. Mais ce ne saurait être un point de départ.
Voir que tout ce qui est, en cet instant, n'est autre que l'Essence-Une, et qu'en cette essence n'existe "réellement" ni quand ni où ni pourquoi, ni si, ni comment ni mais et que cet instant est la Liberté absolue suffit....
Voilà, c'est un ressenti, rien de plus...

samedi 16 avril 2011

Qui s'en soucie ?

Extrait de « Tout est conscience » de Ramesh Balsekar


Chaque mois, le disciple envoyait à son maître un rapport sur ses progrès.
Le premier mois, il écrivit :
"J'éprouve une expansion de la conscience et je fais l'expérience de mon unité avec l'univers."
Le maître jeta un coup d'œil à la note et la jeta.
Le mois suivant, voilà ce que le disciple avait à dire :
"J'ai finalement découvert que le Divin est présent en toutes choses."
Le maître sembla déçu.
Le troisième mois, les mots du disciple s'exclamaient avec enthousiasme :
"Le mystère de l'Un et du multiple s'est révélé à mon regard émerveillé."
Le maître hocha la tête et jeta de nouveau la lettre.
La lettre suivante disait :
"Personne ne naît, personne ne vit et personne ne meurt, car l'ego n'existe pas."
Le maître leva les bras au ciel dans un geste de total désespoir.

Après cela, un mois passa, puis deux, puis cinq - et finalement une année entière sans aucune lettre.
Le maître pensa alors qu'il était temps de rappeler à son disciple qu 'il avait le devoir de le tenir informé de ses progrès spirituels.
Alors le disciple répondit :
"Qui s'en soucie ?" (Who cares ?).

Quand le maître lut ces mots, un air de grande satisfaction s'afficha sur son visage.

vendredi 15 avril 2011

L'effort personnel

Extrait de « Perles du coeur d'Amma » d'Amma


Question : Amma, certains déclarent que, notre nature réelle étant Atman, il n'est pas nécessaire d'accomplir des pratiques spirituelles. Ils affirment : « Je suis Cela, la Conscience absolue, alors à quoi sert de faire une sadhana (des pratiques spirituelles), si je suis déjà Cela ? » Penses-tu que de telles personnes sont dignes de foi ?

Amma ne veut pas juger si ces gens sont dignes de foi ou pas.
Toutefois, Amma a le sentiment qu'où bien ils font semblant d'être ainsi, ou bien ils sont dans l'illusion la plus totale, ou bien encore ils sont paresseux.
Amma se demande s'ils diraient :
« Je n'ai pas besoin de manger ni de boire parce que je ne suis pas le corps ».

Imagine qu'on les fasse entrer dans la salle à manger où de nombreux plats sont joliment arrangés sur la table. Mais au lieu du somptueux repas auquel on pourrait s'attendre, il n'y a sur chaque plat que des morceaux de papier sur lesquels sont écrits les mots « riz », « légumes vapeur », « pudding sucré », etc. Seront-ils prêts à imaginer qu'ils ont mangé tout leur content et que leur faim est totalement apaisée ?
L'arbre est latent à l'intérieur de la graine.
Mais si la graine, pleine de vanité, se dit : « Je ne veux pas me prosterner devant cette terre. Je suis un arbre. Je n'ai pas besoin de m'enfoncer dans ce terreau sale ».
Si telle est l'attitude de la graine, elle ne germera pas, ne donnera aucune pousse et ne deviendra jamais un arbre qui offre de l'ombre et des fruits.
Il ne suffit pas que la graine pense qu'elle est un arbre pour qu'il se passe quelque chose.
Si elle fait cela, elle restera à l'état de graine.
Donc, soyez une graine, mais soyez prêt à tomber sur le sol et à rentrer sous terre.
Alors la terre prendra soin de la graine.

jeudi 14 avril 2011

Le mythe du travail sur soi

Article de Mathieu Clotuche
publié dans le n° 74 de la revue 3eme Millénaire


On ne peut pas faire un effort qui nous éveille sans que cet effort ne soit dicté par l'éveil - de l'éveil, car tout autre effort ne peut être que dicté par la raison, c'est-à-dire donc issu d'une conversation intellectuelle ayant trouvé plus de "pour" à cet effort que de "contre". Ce jugement raisonnable est sans lien avec l'éveil, car l'éveil est spontané.
L'effort donc qui n'est pas dicté par l'éveil ne peut pas prétendre nous éveiller. En outre, l'éveil étant spontané, l'effort dicté par l'éveil ne peut être que spontané. On ne peut donc pas dire que cet effort en est réellement un (car il n'y a aucune violence décidée).
Décider d'un effort ne peut donc pas avoir d'autre utilité que, quand cela se passe bien, de nous faire comprendre que toutes ces décisions sont inutiles.
On peut donc en conclure que le travail sur soi est un mythe, car le lâcher-prise n'est évidemment pas un acte qui puisse être contrôlé par une autre instance que lui-même. Effectivement, je ne suis capable de lâcher prise que quand je lâche prise.
Nous ne sommes pas capables de nous éveiller à partir de ce qui est non-éveil !
Nous ne pouvons poser l'acte d'éveil qu'à partir de l'éveil, et l'éveil n'est pas imitable !
Ces constats ravageurs induisent en notre for intérieur un effort (une tension) et un abandon (une détente) qui ne sont plus atteignables par le contrôle de notre raison.
À force d'ainsi constater, nous devenons capables d'éveil... spontanément.
Ce constat peut même aller jusqu'à s'appliquer à notre regard lui-même, car nous pouvons aboutir là où nous sommes obligés de constater que nous sommes incapables de chercher au moyen d'une recherche intellectuelle le regard qu'il convient d'adopter pour aller dans le sens de la conscience, qu'il nous faut donc "chercher directement à partir de l'éveil", que nous n'avons plus d'autres choix, que, intellectuellement, nous ne progressons plus en discourant mais seulement... en concluant !
En fait, nous ne pouvons pas marcher vers l'éveil, mais seulement à partir de l'éveil.
On peut donc raisonnablement penser que le constat de toutes ces impuissances (qui, à chaque pas, envahit un peu plus) fait déjà partie intégrante de l'acte qu'est l'éveil - la conscience, qu'il constitue sa face obscure, qu'il est son "non", qu'à partir de lui l'éveil-oui s'auto-stimule spontanément.
Et ces constats "salvateurs", comment naissent-ils ?
Ils naissent spontanément au sein de ces échouements répétés de toutes nos tentatives d'originer notre regard, nos pensées, nos décisions, nos efforts, nos actes d'un ailleurs à l'endroit où l'éveil se donne vie, d'un ailleurs à l'endroit où nous prenons conscience, d'un ailleurs à cette zone en laquelle, en y entrant, notre conscience s'allume et se lève et se met à éclairer le paysage de notre regard.
Le fait d'échouer est donc le point de départ.
En constatant ainsi, nous apprenons petit à petit à nous retirer de ces hypnoses que notre réflexion et nos souffrances et nos rêves et nos violences (et même nos fuites) exercent sur nous, à décoller notre regard des regards en lesquels ces mouvements tendent à nous faire croire. Nous ne donnons plus de valeur à ces interprétations, parce que nous constatons qu'elles ne font qu'échouer. Nous cessons d'autoriser inconsciemment ces dictatures à prendre et originer notre regard, parce que nous ne croyons plus en elles.
Si je cesse de croire en tout ce qui n'est pas éveil, je laisse la place à l'éveil ! 
Peut-être que le seul travail de la foi est cet abandon, ce renoncement à toute croyance en un autre mouvement que celui de conscience, cet abandon actif, voulu, accepté, entretenu. Cette mobilisation osée de tout nous-même autour de cet abandon.
Seule la conscience est capable de se trouver !
Le point central est donc celui de mon regard. Apprendre à accepter ce regard qui voit et reconnaît l'échec complet de tous les regards qui ne sont pas celui de conscience. Autoriser ce regard qui voit et reconnaît l'échec total des regards que ma réflexion me propose d'adopter. Voir l'échec permanent de ces tentatives incessantes, et par ce simple regard, sans rien devoir changer, être extrait des emprises de ces regards. Me donner ainsi l'occasion de voir et de regarder (et donc d'éclairer ce que je regarde) à partir d'un regard autre. Pouvoir alors, à partir de ce regard autre, constater que sous cet éclairage-là, ma réflexion, sans l'avoir cherché, se met à cesser sa recherche folle et inutile, qu'à partir de ce regard qui la précède et qu'elle recherche sans en avoir les moyens, elle trouve son juste fonctionnement (celui-là qu'inutilement elle recherche).
Ce simple acte-là est le premier temps de l'acte de Conscience !
Il n'y a donc pas besoin de se transformer (cette recherche est ce même leurre) : simplement constater l'inutilité de toutes ces tentatives, de toutes ces entreprises.
Même la souffrance (qui est une autre tentative de s'éveiller) est vaine (mais pas besoin de chercher à l'éliminer, c'est pire : simplement constater en direct qu'elle est incapable de me faire prendre conscience, et laisser ce constat produire ses fruits) ? Sortir de toutes ces hypnoses (de toutes ces propositions, de toutes ces recherches, de tous ces essais en regardant leur incapacité à nous faire prendre conscience, en regardant leur inutilité être en train de se produire. Si l'on n'aboutit pas à la conscience, c'est que l'on est en train de croire en l'utilité d'un mouvement autre (croyance qui permet à ce mouvement de prendre la place et de colorer tout mon regard de la couleur de lui-même).
Mon unique travail ?
Faire lumière sur tous ces mouvements et toutes ces stratégies qui me squattent maintenant et qui n'aboutissent pas. Voir qu'ils n'aboutissent pas. Me laisser être travaillé par ces constats, sans forcer, sans combattre, sans juger, sans rien empêcher.
Seul l'éveil est capable de se faire naître !

N.B. : Bien entendu, tous les mouvements induits par la lecture de tels concepts et qui ne sont pas, en temps réel, liés à ce dévoilement de notre conscience (en fait induits par lui) n'échappent pas au constat de leur totale inefficience (constat qui est, rappelons-le, le premier temps de cet acte de conscience, sa stabilité, sa garde rapprochée).

mercredi 13 avril 2011

Le grand maître Houeï-Tchong

 Extrait de « Humour Zen »
de Henri Brunel


Ce jour-là, dans le monastère Tch'an, c'est l'effervescence.
On attend la visite du grand maître Houeï-Tchong.
Tous les moines ont mis leur robe de fête et se sont fait une âme attentive, un esprit droit pour accueillir la parole. Le responsable du temple reçoit Houeï sur le seuil en s'inclinant trois fois, les mains jointes à hauteur du front en signe d'infini respect.
Le maître monte en chaire.
L'assistance se recueille.
On entendrait une mouche voler.
Un raclement de gorge, et le silence s'installe, se prolonge.
Une minute, puis deux.
Houeï, debout dans la chaire, se tait.
Une sorte d'angoisse serre les cœurs.
Que se passe-t-il ?
Enfin, le responsable du temple s'avance d'un pas :
« Maître, dit-il, nous attendons dans le recueillement vos saintes paroles, veuillez je vous en prie exposer votre thèse, nous la recevrons comme un cadeau du ciel...
- J'ai déjà proposé ma thèse, articule enfin Houeï, et il se tait.
- Quelle est-elle, ô Maître ? » insiste le responsable du temple.
Houeï ne répond pas.
Il descend en silence de la chaire, et s'apprête à quitter le monastère.
Avant de franchir le seuil, il ajoute :
« Ce que j'ai dit dépassait sans doute votre compréhension... »
Les moines regardent partir le grand maître, éberlués.
Mais il est vrai que le silence se situe au-delà des effets et des causes, et présente la face la plus authentique du Tch'an.

mardi 12 avril 2011

Florilège n°2

Extrait de « My Secret is Silence »
(Mon secret est le silence) d'Adyashanti
Traduction : Isabelle Padovani
Nota bene : ce livre n'a jamais été publié en français 


En tant qu’enseignant spirituel, mon travail est d’exprimer quelque chose qui ne peut être exprimé.
Mon travail est de bien échouer.
***
N’imitez pas votre enseignant ou votre guru.
Trouvez en vous la force qui l’anime.

***
Une question spirituelle est comme un réveil lancé dans le rêve.
« Qui suis-je ? » appelle à questionner tout ce en quoi croit le rêveur, y compris lui-même.
Cela interrompt le rêve. C’est son intention.
Quand votre réveil sonne le matin, son intention n’est pas d’obtenir une réponse.
Son intention est de vous réveiller.

***
Quand le mental cesse toute imagination, émerge alors une vérité cristalline si vraie et concrète que le monde entier semble un rêve, en comparaison.
***
Il y a seulement la vie se vivant elle-même,
la vie se voyant elle-même,
la vie s’entendant elle-même,
la vie se rencontrant elle-même,
à chaque moment.
***
Vous est-il jamais apparu que cela ne se passe pas quelque part en dehors de votre tête ?

***
Ne cherchez pas à saisir ce qui est réalisé.
Soyez ce qui est réalisé.
Vous ne pouvez maintenir la réalisation ou la prolonger.
Afin qu’elle soit toujours, vous devez l’être vous-même – dans votre humanité.

***
Venez au satsang pour percevoir ce qui est vrai,
pas pour résoudre ce qui irréel.

***
Si cela ne fait pas sens pour vous, ne vous inquiétez pas,
ça le fera un jour…

lundi 11 avril 2011

Le témoin : de l'établissement à l'effondrement

Extraits de « La Voie directe : s'identifier à la conscience pure»
de Greg Goode


Pages 25 - 27

Quand les objets apparaissent, ce n'est jamais identifiés à une pensée, un sentiment ou une sensation. Même si la "pensée" est dénommée par une autre pensée, en fait les deux ne se croisent jamais, comme on le verra dans l'expérience ci-dessous. Il n'y a donc aucune raison de croire que ce qui apparaît est réellement une pensée, un sentiment ou une sensation. Ces termes étaient utiles précédemment, quand on les utilisait pour prendre conscience que les structures physiques et mentales ne sont pas des objets réels, indépendants de la conscience pure. Mais une fois que le monde ne nous apparaît plus comme des structures physiques et mentales, ces termes ont accompli une grande partie de leur travail de déconstruction. On peut alors les laisser de côté ; et si on a en besoin par la suite, on peut faire de nouveau appel à eux. Ce procédé consistant à utiliser une technique puis à l'abandonner une fois qu'elle a accompli sa tâche a une longue et vénérable histoire dans les traditions non-duelles. On l'appelle généralement 'sublation'. Donc, quand nous laissons de côté l'idée de pensées, sentiments et sensations, nous aurions peut-être intérêt à utiliser un terme plus neutre qui n'implique pas la présence à l'arrière-plan de structures psychologiques. J'appelle parfois ces va-et-vient "manifestations".
On n'a jamais l'impression que ces manifestations se produisent ailleurs que dans la conscience pure. Elles ne se produisent jamais à l'extérieur de la conscience pure pour la même raison qu'en langage courant nous dirions qu'il est impossible qu'une pensée apparaisse à l'extérieur de la conscience pure. Même dans le langage courant, cela fait partie de notre définition de 'pensée' de dire qu'elle est naturellement et logiquement reliée au mental ou à la conscience séparée de l'individu.
Les pensées ne sont jamais séparées de la conscience, même dans les films de science fiction. Ce même lien organique vaut pour tous les objets de la conscience (que l'on peut aussi appeler 'manifestations'). En fait, même si nous définissons un type spécial de manifestation se produisant à l'extérieur du champ de conscience, une impossibilité logique surgit pour nous prouver que nous faisons erreur. Supposons que nous définissions une manifestation spéciale XYZ, capable de se produire à l'extérieur de la conscience. Voici pourquoi c'est impossible : dès que cette manifestation arrive dans le champ de définition, elle arrive dans le champ de conscience. Cette manifestation ne peut pas se trouver ailleurs. En fait, puisque la conscience n'est pas géographique, la notion même de conscience en tant que lieu disparaît.
Les manifestations apparaissent à la conscience témoin en flux successifs. Elles apparaissent, demeurent et disparaissent, l'une après l’autre. Il y a parfois des intervalles entre elles. Et tout au long, la conscience pure est présente. Étant cette conscience, vous êtes continu et ininterrompu, même si aucune manifestation n'est présente. Le sommeil profond en est l'exemple le plus parfait. Pen¬dant le sommeil profond aucune manifestation n'apparaît, et pourtant on n'a jamais l'impression d'être absent. On n'a jamais l'impression d'avoir cessé d'exister au début du sommeil profond et ressuscité au réveil. Il semble que d'une manière agréable et subtile on ait toujours été là.
Bien sûr, votre 'présence' n'est pas un objet. Ce n'est pas le même type de présence que celui d'une manifestation. Une manifestation semble capable d'être présente et puis non présente plus tard. Mais vous, en tant que conscience pure, n'êtes pas présent de cette façon.
En tant que conscience pure, vous ne vous manifestez pas et vous ne pouvez jamais être absent.
Vous n'êtes pas présent à la manière d'un élève dans une liste d'appel.
En fait, votre nature de conscience pure est en soi présence.

dimanche 10 avril 2011

Quelles sont les preuves de la conscience séparée ?

Extrait audio d'un dialogue avec Francis Lucille
lors de la retraite à Paris de l'hiver 2010


"Je comprends le concept d'unité, mais quand je parle à quelqu'un d'autre, c'est quelqu'un d'autre."

Francis explique que le mental ne peut pas concevoir la conscience, il ne peut que percevoir des perceptions, des représentations limitées. Nous sommes certains qu'il y a conscience et nous n'en percevons pas les limites dans le temps et dans l'espace, mais nous supposons l'existence de ces limites individuelles à la conscience. Francis montre les fausses conclusions que nous tirons de notre expérience, et qui mènent à cette supposition.

Extrait audio français avec traduction en anglais - durée : 12 minutes
Cliquez sur le bouton vert pour lancer l'écoute.

samedi 9 avril 2011

Oui, la souffrance a une fin

Extrait d'un article de Nicole Montineri
publié dans le n° 99 de la revue 3eme Millénaire


Aucun événement qui survient n'est en lui-même souffrance, pas même la grave maladie ou le handicap. Toutes les circonstances de la vie sont l'occasion d'une silencieuse découverte de la paix inhérente à chaque expression de la réalité. C'est notre regard alourdi par nos pensées et nos émotions qui est porteur de souffrance. Nous sommes incapables de poser sur les événements une attention profonde et aimante. Nous aimerions tellement que la réalité soit autre !
Par exemple, dès que notre corps devient faible ou douloureux, notre esprit génère aussitôt une angoisse due à notre identification au corps à la peur de ne plus pouvoir contrôler notre vie comme nous l'entendons. Nous regrettons l'état de santé antérieur, nous imaginons le pire et nous nous infligeons une fuite ou une bataille désespérée devant ce qui est.
Vouloir guérir à tout prix est signe que nous refusons le changement, l'impermanence au sein de tout phénomène. Pourquoi le corps, qui n'est rien d'autre qu'une forme apparente et limitée de notre être véritable, ne connaitrait-il que l'état de santé ?
Même dégradé, il est un moyen par lequel la vie s'expérimente, avec une finesse de perception qui va bien au-delà de cette forme. Il s'agit de l'accepter changeant, d'admettre sa dégradation, de l'aimer aussi et, bien sûr, de le soigner. A notre mort, l'abandon de ce corps vient nous rappeler que seule la conscience demeure, de toute éternité.

C'est lors d'une grave maladie, tandis que je me tenais dans un état de disponibilité totale, sans attente de quoi que ce soit, que j'ai pu découvrir la réalité de notre nature véritable. Mon corps sur le point de périr fut l'instrument par lequel l'énergie cosmique investit ma conscience, la déploya jusqu'à ce qu'elle se fonde dans l'espace infini.
Nous avons tous la capacité de percevoir la maladie exactement telle qu'elle s'exprime à travers ses symptômes, sans l'interférence de pensées parasites.
Nous pouvons tous comprendre la maladie, c'est-à-dire la prendre en nous, l'intégrer, afin d'abolir tout conflit, toute dualité, source de souffrance.
La lutte, l'attente obstinée de la guérison provoquent tensions et angoisses.
Allégeons-nous, apaisons ce qui en nous recherche un but, ne nous attachons pas à notre douleur, nous ne sommes pas elle. Il existe une dimension qui n'est jamais dégradée.
Au niveau absolu, celui de notre véritable nature, la maladie n'existe pas. Il n'y a rien à guérir.

Sur le plan de notre destinée terrestre, la maladie nous offre l'occasion d'avoir une générosité d'abandon de soi, sans condition, sans exigence. Nous ne la voyons plus alors comme une manifestation pénible, mais comme une invitation à creuser au plus profond de la vie, à découvrir son sens au plus intime de notre être. Nous ne voyons plus seulement la déchéance physique mais notre véritable nature qui se tient derrière, intacte, vide de toute croyance en une souffrance.
Quelle que soit l'évolution de la maladie, nous acceptons qu'elle fasse partie de notre voyage terrestre car nous savons que notre nature fondamentale demeure inchangée.
Ainsi vue, la maladie développe notre capacité de patience, de douceur, de sagesse, de compassion envers tous ceux qui souffrent.Elle a un sens profond, comme chaque chose que nous expérimentons ici. La maladie est toujours porteuse d'un message qui nous indique une voie de transformation, de réajustement à ce que nous sommes ou de libération de notre identification au corps. Quelle que soit la dégradation de celui-ci, ne nous sentons pas misérables, car nous sommes aimés tels que nous sommes... La douleur physique est une réaction nerveuse et nous disposons maintenant de moyens pour l'adoucir. La douleur psychologique survient lorsque nous nous accrochons à notre petit tas personnel d'accumulations, constitué de savoirs et d'expériences que nous avons fait nôtres, et que nous nous opposons à tout ce qui vient le déranger.
Il faut parfois de nombreux coups pour que nous acceptions d'être dérangés et de nous interroger sur l'origine et la nature de notre souffrance. Ce que nous appelons épreuve nous est proposé pour nous sortir de notre torpeur, nous bousculer dans nos certitudes, nous arrêter dans nos conquêtes extérieures et nous placer sur la voie qui mène à soi.

Les événements sont parfaitement accordés à ce que nous devons vivre, à notre intériorité, mais par notre incompréhension, nous préférons fuir ou nous isoler, nous replier sur nous-mêmes ou nous révolter. L'épreuve est une proposition d'ajustement ou de dépouillement qui nous est faite, mais nous l'accueillons rarement comme une invitation à nous transformer, à faire retour sur ce que nous sommes véritablement. Nous ne la comprenons pas car nous voulons y échapper, en comptant sur un sauveur ou un idéal, en nous étourdissant dans les distractions, en nous réfugiant dans le travail ou en sombrant dans une névrose...
Alors la souffrance finit par engourdir notre esprit, insensibiliser notre cœur.
Nous nous y habituons et devenons indifférents, autant à notre propre souffrance qu'à celle des autres. Nous ne la reconnaissons plus et nous nous fermons à toute compréhension profonde de ce qu'elle est, et donc à toute possibilité de nous en libérer.

Car oui, la souffrance a une fin, et sa fin donne la paix...
Elle se trouve dans sa rencontre, dans son contact direct, sans l'intermédiaire d'un moi séparé qui la rejette ou l'accepte. Si je peux comprendre ce qu'elle est véritablement, c'est-à-dire l'intégrer totalement, la regarder sans division, sans la verbaliser, sans émettre de jugements dessus, l'esprit complètement vide à son sujet, elle se dissout. Dans le contact direct avec elle, sans fuite, sans évasion, sans explications ni espoirs non plus, sans tout ce processus mental complexe qui se met en route, il n'y a plus de place pour la peur. C'est cela, la vraie libération, et non le refuge dans des solutions superficielles qui ne satisfont que nos ego.

La vie nous manifeste sans cesse son amour, même à travers le pire des malheurs.
Mais nous, nous avons pris l'habitude de sélectionner ce qu'elle nous offre, nous lamentant si elle ne satisfait pas nos désirs égotiques...
Il s'agit d'arriver à nous abandonner à son énergie de compassion, avec une confiance absolue en tout ce qu'elle nous présente.
Il n'est pas d'autre intelligence.