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mardi 31 mai 2011

Le Bouddha de bois

 Extrait de « Humour Zen »
d'Henri Brunel



Par une terrible nuit d'hiver, le moine zen Tan-Hsia trouva refuge dans un temple qui paraissait abandonné. Il alluma un feu, déplia son futon et s'endormit.
Vers le matin, le bois manquant, il prit sur l'autel une statue de Bouddha en bois et la jeta dans les flammes.
Quand le gardien du temple arriva et constata les dégâts, il entra dans une violente colère :
«Je vais vous faire arrêter pour sacrilège ! » s'écria-t-il.
Tan-Hsia ne disait mot et fouillait dans les cendres.
« Que faites-vous ? demanda le gardien du temple.
- Je mets de côté les reliques sacrées du Bouddha...
Voyons, dit le gardien en haussant les épaules, comment pouvez-vous recueillir les "reliques sacrées" d'un Bouddha de bois, vous êtes stupide !
- Si les reliques ne sont pas sacrées, alors le Bouddha ne l'était pas non plus», fit Tan-Hsia, et, se redressant, il saisit sur l’autel un deuxième Bouddha de bois qu'il lança joyeusement dans le foyer.

dimanche 29 mai 2011

Maître authentique, disciple authentique...

Extrait de « L'obligation de conscience»
de Yvan Amar


Yvan Amar
II est nécessaire, par une intimité avec soi-même, de développer ce qui nous manque à tous, parce que nous sommes si souvent prisonniers de la peur : il faut développer la générosité.
Nous manquons déjà tellement de générosité à l'égard de ceux qui peuvent nous transmettre quelque chose ! Parce que nous vivons dans le manque et dans la peur, nous attendons des instructeurs, ces témoins du réel - à plus ou moins juste titre peut-être -, qu'ils soient parfaits.
Combien d'entre nous n'ont pas dit, à un moment ou à un autre : « Cet instructeur-là ne me suffit pas, il n'est pas à la hauteur pour moi… ». On voudrait bien avoir l'instructeur parfait, celui auquel ou n'aurait rien à reprocher. Il serait important cependant que le disciple - ou le candidat disciple, comme disait le maître d'Arnaud Desjardins, Swami Prajnanpad - puisse, en un premier temps, se dire la chose suivante. Au lieu de prétendre : « Qui est-il, celui-là, pour me donner une leçon ? », l'élève ne devrait-il pas se poser la question : « Qui suis-je, moi, pour refuser une leçon ? » En d'autres termes, l'accent ne serait plus mis sur le fait d'avoir un gourou ou un maître parfait, mais d'être soi-même un disciple authentique.
Ce qui veut dire : ne plus recevoir la leçon de tel gourou, mais plutôt devenir disciple de la vie et de toutes les circonstances dans lesquelles, jusque-là, nous étions victimes de cette vie à travers les revendications de notre intérêt personnel.
Tout en étant habités de cette générosité, de cette qualité de conscience, il nous appartient néanmoins d'éviter ce qui pourrait devenir, chez un élève, une habitude pathologique de blanchir les écarts de l'instructeur.
Il n'est absolument pas question que la vie d'un élève, sous prétexte qu'il est élève, soit envahie par la nécessité de constamment justifier, légitimer ou blanchir les comportements d'un instructeur. Je veux parler d'un véritable instructeur, c'est-à-dire un être qui a vécu l'éveil de façon absolue et que son destin appelle à transmettre l'impeccabilité, la nécessité de devenir plus conscient de la volonté de Dieu et d'y répondre dans le quotidien.
On conçoit qu'un tel être ayant vécu quelque chose d'absolument unique par son éveil, mais ne l'ayant pas complètement intégré en lui, peut s'avérer sujet à des écarts, de par son humanité.
Même s'il s'agit d'un instructeur authentique, ces écarts ne deviennent pas pour autant des enseignements, et n'ont pas à être pris comme tels par ceux qui vivent près de lui, cela doit être clair.
Par contre, lorsqu'il témoigne de la nature du réel et de la façon dont on peut éveiller en soi une écoute, une qualité d'attention nous permettant d'entendre la volonté divine et d'y répondre à travers cette obligation, il est alors nécessaire de faire abstraction des éventuels écarts que cet homme ou cette femme peuvent avoir dans leur vie, et de se dire :
« Pourquoi devrais-je être victime de ce qu'il fait, quand il m'est demandé pour l'instant d'être disciple de ce qu'il dit ? »

samedi 28 mai 2011

Je ne sais pas

Extrait de « Eclats de silence » de Daniel Morin


II y a qu'une seule vérité absolue que personne ne peut nier, c'est « Je suis ».
Pourquoi : « Je suis » ?
La seule réponse honnête qui s'impose à tous, c'est : « Je ne sais pas ».
C'est pour moi la seule réponse authentique.
Dans notre culture, ne pas savoir est vu comme un signe de faiblesse, une absence de réponse, alors que reconnaître que l'on ne sait pas est la seule réponse vraie du point de vue de l'Inconnaissable.
Tout chercheur sincère, quelle que soit la somme de ses connaissances, doit toujours se trouver dans cet état d'humilité : « Je ne sais pas tout ».
Nous n'arriverons jamais à saisir la Totalité parce que l'intellect ne fonctionne que par exclusion. Nommer une chose, c'est la fixer, l'extraire et l'isoler artificiellement de son environnement. De ce fait, nous oublions l'échange vivant, le Un.
Le mystère du vivant est fantastique.
Qu'est-ce qui se passe entre un ovule et un spermatozoïde ? La vie n'est pas contenue dans une cellule, mais dans l'échange entre les parties. Cet échange est insaisissable.
Après toutes ces années de recherche dans l'exigence, dans la sincérité, je ne suis libre que d'une chose, de l'idée même de la « libération ».
J'ai compris aussi qu'aucune forme perçue par un sujet n'a de libre-arbitre propre.
J'ai simplement la certitude d'être à la fois de la nature du Tout, qui échappe à la mesure, et d'être à la fois une partie limitée fonctionnant dans le concept du temps, du changement, avec un apparent choix et un apparent libre arbitre.
POURQUOI PAS ?
Simplement, ne pas en être dupe. Tout de suite, pour chacun, là, tel quel, c'est l'expression de la totalité de la Vie. Personne, jamais, ne peut être autre que ce qu'il est maintenant.
Rien ne manque à EST. Aucune partie ne peut être en dehors de EST.
Être simplement ouvert à l'évidence, à l'image réelle et non se cacher dans le virtuel.
Vivre simplement sa vie consciente en conduction de ce qui nous dépasse.
Tout existe en même temps, la totalité et la partie, l'absolu et le relatif, le relatif n'étant que la vision partielle de l'absolu.
Lorsqu'on ne nomme pas et qu'on se laisse absorber dans la contemplation d'une fleur, d'un paysage, il peut y avoir un sentiment de complétude, de non manque.
Beaucoup d'enseignants traduisent le « Je ne sais pas » en formules comme : « c'est le jeu divin », ou « les voies de Dieu sont impénétrables ».
Aucun être humain, quel qu'il soit, ne peut expliquer ce que le silence révèle.

vendredi 27 mai 2011

La célébration de notre unité

Article de Francis Lucille
publié dans le n° 80 de la revue 3eme Millénaire


Nous sommes conditionnés à nous considérer comme des entités séparées, et les relations humaines se déroulent dans ce cadre. Se pose ainsi la question de la relation à l'autre. L'autre se trouve face à moi, et le jugement intervient à la vitesse de l'éclair : peur, désir, intérêt, jalousie, etc. Quelle voie vers une relation harmonieuse ?

La voie vers une relation harmonieuse avec les autres passe par une relation harmonieuse avec soi-même. La voie vers l’amour des autres passe par l'amour de soi. Nous le savons d'une manière intuitive. Si nous sommes en présence de quelqu'un qui ne s'aime pas, nous avons instinctivement une réaction de défense. En revanche, si quelqu'un est à l'aise avec lui ou elle-même, nous souhaitons être en présence de cette personne. Déjà, se mettre à l'aise avec soi-même, s'aimer soi-même, nous mènera assez loin vers l'harmonie avec les autres. En fait, nous nous aimons nous-même. Tout le monde aime le Soi, tout le monde aime la conscience. Mais, à un certain moment, nous avons fait fausse route et avons identifié la conscience à un objet : le corps, le mental, l'individu. L'amour a été ainsi détourné au profit d'un objet limité. Or, un objet nous laissera toujours insatisfait. Le retour à l'amour de soi passe par la connaissance du Soi véritable. Une fois ouvert à la possibilité que la conscience n'est pas personnelle, non limitée à un corps ou un mental individuel, mais que le Soi est le Soi de tous les êtres, à ce moment-là notre relation avec l'autre change. Lorsque nous parlons avec l'autre, que nous sommes en contact avec l'autre, au fond des yeux, du Soi de l'autre, se trouve notre Soi. Il n'y a pas de différence ni de distance, et ceci nous donne un accès immédiat vers l'autre. Hier, j'ai amené ma petite fille au magasin de jouets, et je lui ai donné la liberté de choisir. A la sortie du magasin, j'ai senti qu'elle se rapprochait de moi, et elle m'a pris la main. C'était sa façon spontanée de dire merci, d'être avec moi. Lorsque notre Soi est vu comme celui de l'autre, nous avons une relation directe dont les enfants peuvent encore bénéficier.
Même si nous nous adressons au président directeur général de telle ou telle banque, nous avons la possibilité de sauter par-dessus les diplômes, les titres, la différence de richesse, et d'aller directement au cœur de l'enfant que nous sommes, l'un comme l'autre. Nous sautons par-dessus ce que nous ne sommes pas pour toucher ce que nous sommes. On peut, pourquoi pas, utiliser cela comme un exercice pratique dans la vie de tous les jours : au contact d'un autre être, nous ouvrir à la possibilité que la conscience chez cet être et en nous est la même. Nous sommes comme deux fleurs sur un arbre se regardant l'une l'autre, en ayant conscience de leur tronc commun sur le même arbre. Bien sûr, dans le quotidien, nous pouvons découvrir notre incapacité à nous ouvrir à cette vision. On peut alors s'entraîner pas à pas : faire cela avec la chaise, puis avec le chat ou le chien, les gens qui vous aiment, ceux qui sont neutres et ainsi progressivement aller vers le plus difficile.

L'amour de nous-même est une descente de la tête vers le corps. Ordinairement, la sphère du penser, qui est le plus souvent dans la mécanicité répétitive, semble coupée de la sensibilité. Comment aborder cette scission entre la tête et le corps ?

Cette scission entre la tête et le corps est l'absence de connaissance du corps. Il s'agit en fait d'une dichotomie entre la pensée et la sensation. Tant que le corps reste inexploré et inconnu, le sentiment de séparation peut s'y cacher. En d'autres termes, je vis dans l'ignorance, en tant qu'entité séparée, certain que j'ai quelque part dans mon corps la preuve que je suis bien une entité séparée. Mais cette preuve n'a jamais été explorée, je ne l'ai jamais mise au jour.
C'est un peu comme un procureur qui dit avoir dans son coffre la preuve de la culpabilité d'une personne, sans avoir jamais regardé dans le coffre. Un jour, ouvrant le coffre, il en découvre l'absence. Ce que je suggère est d'ouvrir le coffre : laisser l'attention explorer le corps. Lors de nos premières tentatives, nous rencontrons souvent un niveau de résistance, d'aversion, qui nous amène à faire marche arrière. Si nous per¬sévérons, nous finissons par nous habituer à la résistance, comme si celle-ci perdait graduellement sa charge affective, psychologique, et devenait une sensation parmi d'autres. Nous sommes alors libérés de cet objet.
Notre grande tante nous fait cadeau d'un canapé affreux. Pour ne pas la décevoir, le canapé se retrouve au milieu du salon et se voit comme le nez au milieu de la figure. Mais jour après jour, l'œil s'habitue. Au bout de deux ans, on ne le remarque plus. C'est le moment que choisit la tante pour passer dans un monde meilleur, et on peut alors se débarrasser du canapé.
L'ignorance a ses racines dans le corps, comme dans le mental sous forme de croyances et d'habitudes de pensée. Dans le corps, elle prend la forme de localisations auxquelles on s'identifie quand on pense à soi-même: Que suis-je ?
Nous allons trouver des localisations dans le ressenti.
Mais il est ridicule de penser que nous sommes cette tension dans les lèvres, ou cette sensation dans la poitrine. Bien sûr que ce n'est pas moi.
Mais encore faut-il amener la lumière dans le corps pour découvrir que ce n'est pas moi, non pas d'une manière intellectuelle mais au contraire vécue.
Dans les dialogues avec Ramana Maharshi, quelqu'un l'interroge au sujet de l'investigation sur le « qui suis-je ? » : l'enquête doit-elle se faire au niveau de la pensée ou au niveau du ressenti ? Maharshi répond : le ressenti.

La sensation se nettoie donc de toute coloration affective...

Mais il ne s'agit pas d'une purification que l'on fait. Elle se fait.
L'analogie peut nous aider à comprendre la différence entre le domaine de la pensée et celui du ressenti. La différence entre comprendre quelque chose au marxisme et être communiste correspond à la différence entre une croyance et un concept. Il en va de même au niveau du ressenti : c'est la différence entre la sensation corporelle, l'équivalent du concept, et le ressenti qui serait le concept chargé affectivement.
Dans l'écoute corporelle, les ressentis perdent leur charge affective de résistance, d'aversion ou de désir pour ne devenir que des sensations corporelles. Parfois, elles s'estompent complètement quand elles avaient été créées seulement dans le but de générer une entité séparée. Parfois aussi elles se révèlent pour ce qu'elles ont toujours été quand il s'agit de sensations purement fonctionnelles. La respiration en est un bon exemple.

Mais la charge affective se trouve plaquée sur le ressenti à la vitesse de l'éclair, d'une façon inconsciente.

Oui, mais au fur et à mesure que nous explorons le corps et le mental dans cette recherche du qui suis-je, les couches viennent à la surface et se dissipent. Ces mécanismes, à partir du moment où ils sont vus, quand ils affleurent vers la conscience, perdent leur virulence.

Ce que tu dis sur la dissolution de la charge affective, souvent négative, par le ressenti, est essentiel dans le cadre de toute relation. Si on considère le fait de créer un couple, de chercher un partenaire, on voit que cette recherche repose bien souvent sur celle d'une sécurité, la peur de la solitude. La vie de couple repose ainsi bien souvent sur des fondations instables...

Ce que je disais précédemment est le plus important.
C'est la pierre de touche d'une relation harmonieuse.
Comme le dit l'adage indien : "Voir le Soi dans tous les êtres, et tous les êtres dans le Soi."
Voir le Soi dans sa compagne ou son compagnon, et voir sa compagne ou son compagnon dans le Soi. Si on pouvait appliquer cela, ce serait parfait.
La sexualité joue un rôle important dans les relations entre hommes et femmes, et il s'agit là d'une fonction naturelle qui a été contrôlée par la société pour des raisons peut-être valables à une certaine époque, mais les sociétés évoluent. Dans la société moderne, peut-être y a-t-il moins de raisons de contrôler la sexualité, car ce contrôle se paie en termes de souffrance, et de bonheur.
Au-delà de la sexualité, l'homme et la femme sont complémentaires, et il y a un plaisir à célébrer cette complémentarité. La complémentarité des genres masculin et féminin et la complémentarité sexuelle sont la célébration de notre unité profonde, au niveau subtil pour ce qui est des genres, et physique pour la complémentarité sexuelle.
En outre, l'être humain est un animal grégaire. La plupart d'entre nous aiment la vie sociale. Il y a donc quelque chose de normal dans le désir de ne pas être seul. Mais pas dans le sens de la peur, car celle-ci est anormale. Au contraire, ce qui nous pousse à être avec les autres, à échanger, est aussi une manière de célébrer notre nature commune.
Il y a dans cette célébration de notre nature commune un mot : l'amitié. 
Il s'agit au fond du sentiment le plus désintéressé et le plus impersonnel.
C'est l'expression de l'amour la plus proche de l'amour spirituel car il y a absence de peur, de jalousie et d'attente.  
Nous devrions être dans nos amours comme des amis.
Ce pourrait être une forme de règle pratique.  
L'amour spirituel est vraiment voir le Soi dans le compagnon ou la compagne.

jeudi 26 mai 2011

Union

Extrait du livre « Au coeur du présent»
d'Osho

Créez autant de contacts que possible avec l'existence.
Si vous vous trouvez près d'un arbre, étreignez-le, sentez que vous le rencontrez et que vous vous fondez en lui. Quand vous nagez, fermez les yeux et sentez que vous vous dissolvez dans l’eau ; qu'il y ait une union.
Chaque fois que vous le pouvez, trouvez les moyens de vous détendre et de vous unir à quelque chose. Plus vous unirez votre énergie avec une autre, sous quelque forme que ce soit - un chat, un chien, un homme, une femme, un arbre -plus vous serez proche de vous-même. C'est un travail agréable ; en fait, c'est un travail extatique.
Une fois que vous l'aurez senti, une fois que vous en aurez découvert le truc, vous serez surpris de voir tout ce que vous avez manqué dans votre vie.
Chaque arbre que vous avez côtoyé aurait pu vous donner un grand orgasme, et chaque expérience - un coucher de soleil, un lever de soleil, la lune, les nuages dans le ciel, l'herbe sur la terre - aurait pu être une expérience extatique.
Etendu sur le gazon, sentez que vous devenez un avec la terre. Fondez-vous dans la terre, disparaissez dedans ; laissez la terre vous pénétrer !
C'est une méditation : atteignez l'union de toutes les manières possibles.
Dieu a dix mille portes et il est disponible partout. 
Mais il n'est disponible que dans l'état d'union. 
C'est pourquoi il arrive parfois que les amants découvrent la méditation dans un profond orgasme. C'est une des manières de créer l'union, mais ce n'en est qu'une ; il y en a des millions.
Si l'on continue à chercher, cela n'a pas de fin.

mercredi 25 mai 2011

Un total lâcher-prise

Article de Jean Klein
paru dans le n°83 de la revue 3eme Millénaire


Je suis très intéressée par vos entretiens. J'étais avec vous pendant un week-end : vous utilisez le silence d'une façon si merveilleuse, vous l’utilisez vraiment. Vous n'avez pas peur du silence : la plupart d'entre nous avons peur des moments de silence. Voudriez-vous nous en parler ?

Qui a peur ? Qui a peur ? Dans le silence il y a une parfaite, une totale disparition de l'ego, de la personne, du « je ». Le « je » ne trouve plus de prise pour maintenir les idées, les croyances.

Est-ce de là que vient la peur ?

Oui, c'est une disparition. La vraie naissance est après la disparition, la vraie naissance n'est pas la naissance qui vient par votre mère, la vraie naissance vient lorsqu'il y a un total lâcher-prise. C'est la véritable naissance. La naissance est l'absence totale de vous-même, là se trouve votre présence, là se trouve le « Je suis ».

En tant qu'adulte, pourquoi je ne connais pas ma vraie nature ? Pourquoi ne suis-je pas ? Je veux dire : je suis assise ici : pourquoi ne suis-je pas consciente du « Je suis » et de ma vraie nature ?

C'est sans doute un réflexe profondément enraciné en vous, de vous prendre pour ce que vous n'êtes pas. L'éducation, l'expérience, les habitudes, la société, vous ont amenées à ce que vous êtes ; cela veut dire : je ne me sens pas réellement moi-même, ce que nous appelons en général moi-même...
En quelque sorte, vous vous en éloignez. Vous avez, certainement, des moments de bonheur et ces moments ne sont pas des états. C'est un non-état. Dans ces moments-là, vous ne pouvez pas dire « je suis heureux » ni nommer la cause du bonheur. Vous ressentez seulement votre être total, global dans ce bonheur. Le « je », l'idée d'être quelqu'un n'est pas du tout présent, en cet instant vous n'êtes personne. Mais quand vous en sortez immédiatement, votre mental le récupère, l'ego se l'approprie : la cause de ce bonheur était cette rencontre, cette belle maison, cette telle voiture, ou cette belle fleur. Le bonheur, dans ce moment même, est sans cause. Quand vous dites « Je suis heureux », c'est un état, vous n'êtes pas heureux. Dans le bonheur, vous êtes totalement bonheur, c'est aussi l'amour.

Les enfants viennent-ils au monde avec cette connaissance ? Je ne veux pas dire la connaissance acquise, mais avec l'amour total ? Viennent-ils de cette manière légère ?

Oui.

Et nous tous aussi ?

Oui, nous tous. Dans le ventre de notre mère, nous essayons de nous approprier, de prendre la nourriture ou les émotions de la mère, ou la nourriture que prend la mère. Une fois sorti du ventre de sa mère, l'enfant continue de s'approprier le monde. Comme cette appropriation appartient plus ou moins à la survie biologique, cela crée, d'une certaine façon, un moi subtil, un « je » subtil pour s'approprier le monde, mais c'est seulement une sorte d'outil, c'est comme notre foie ou nos poumons, c'est un outil, rien d'autre... L'enfant s'identifiant à vous, il est important qu'il se libère de cette fausse identification. L'enfant est en grande partie le résultat d'une éducation erronée. Je dirais que l'enfant doit être entouré de beauté, mais pas uniquement : voir, entendre, ressentir sont aussi très important. C'est la beauté qui construit l'enfant. C'est aussi par l'éducation, ce qu'on appelle « éducation », qu'il faut montrer à l'enfant comment regarder, non pas ce qu'il doit regarder, mais comment regarder. Parce que dans le regard vous êtes libre de la mémoire, dans le regard vous accueillez ce qui est regardé. Et un jour, quand vous arriverez à cette maturité, vous réaliserez que l'observateur est l'observé. Il est ce qu'il cherche.

En tant qu'adulte, comment pouvons-nous regarder le monde ? Comment commencer à voir ?

Quand il y a seulement regard sans qualification, il y a pur regard. Essayez de regarder un objet et ramenez le regard vers l'arrière, il n'y a plus rien à regarder, il n'y a que regard.

Jean, je vous ai entendu dire que cela demande un certain degré de maturité pour arriver à ce que vous appelez, « la voie directe », et j'ai suivi, comme beaucoup d'autres, la « voie progressive ». Est-ce ainsi que vous l'avez appelée ? La voie progressive, qui, je pense à de nombreux concepts, est orientée vers un but et de nombreuses attaches derrière elle. Y a-t-il une place pour la voie progressive en même temps que pour la voie directe ? Pourriez-vous l'expliquez un peu ? Est-ce qu'elles se complètent ? Peut-on utiliser les outils de la voie progressive dans cette voie directe dont vous parlez ?

La voie progressive, à proprement parler, ne peut pas vous amener à la maturité. La maturité vient par l'interrogation de la question « qui suis-je ? », qu'est-ce que la vie ? Qu'est-ce que je cherche réellement ? Vous connaissez précisément vos motifs et vous avez regardé dans bien des directions pour trouver ce que vous cherchez : paix, tranquillité, bonheur, toutes les expressions de l'amour, vous ne les avez pas trouvées. Vient un moment où vous vous dites : « je n'ai rien trouvé nulle part » et vous arrivez à cette maturité de « je ne sais pas ». Quand vous dites « je ne sais pas », votre esprit n'est pas encombré par quelque chose à connaître éventuellement. Vous êtes complètement vide. Vous êtes l'espace vide, vous êtes cette immensité. Vous êtes ce vide non meublé et alors vous vous trouverez dans cette dimension, cette dimension sans objet, « être » sans objet : la conscience. Je ne dis pas que certains outils employés dans la voie progressive ne soient pas utilisés parfois dans la voie directe, mais la voie directe pointe directement. C'est pour cela qu'il n'y a pas plusieurs gurus, plusieurs maîtres : il y a seulement un maître.

La méditation et la prière sont des outils très précieux, sont-ils vraiment indispensables si l'on veut suivre une de ces voies ?

La pensée spontanée, la pensée qui surgit du silence, c'est la prière.
Mais prier pour moi, ce n'est pas demander.

Pouvez-vous nous dire encore quelques mots sur la méditation ?

L'expérience que vous avez pendant le sommeil profond est la source de la méditation.
Il n'y aurait pas de méditation sans le sommeil profond.
Quand vous, le "corps-mental" vous réveillez le matin, vous dites « j'ai bien dormi » : cela ne provient pas de la sensation agréable du "corps-mental", cela provient de l'expérience de paix absolue du sommeil profond. Cette paix absolue, qui se reflète encore dans le "corps-mental" vous donne l'impulsion pour la méditation. A votre réveil, en vous adonnant à la méditation : le méditant est une projection mentale et il n'y a rien sur quoi méditer parce que vous ne pouvez méditer que sur ce que vous connaissez déjà ; quand vous le voyez, il y a un lâcher-prise et, alors, que reste-t-il ? C'est un courant d'amour, de présence. La méditation se fait d'instant en instant, pas seulement de six à sept heures du matin.

Pourriez-vous nous parler un peu plus de la méditation d'instant en instant ? La plupart d'entre nous tous travaillent... il y a les enfants... il est difficile de carder cette perspective.

Quand vous êtes avec vos enfants, vous ne vous prenez pas pour une mère ou pour un père ou l'éducateur ; comme vous n'avez pas de représentation de vous-même, à cet instant vous n'avez pas non plus de représentation de l'enfant. Que se passe-t-il ? Il y a une sorte de rencontre d'amour, d'amitié. Autrement, c'est une relation d'objet à objet parce qu'être une mère, c'est un concept ; l'enfant ainsi est un concept. Quand Les concepts "enfant" et "mère" sont éliminés, il y a rencontre : il y a amour.

C'est une très belle pensée, je pense que ce processus de recherche de soi peut devenir très intellectuel par moments. C'est fascinant. Quelle est la place du cœur dans cette voie de la quête intérieure ?

La quête intérieure plonge profondément dans les faits. Je dirais que c'est une sorte de discrimination, de discernement, sans votre cerveau, sans votre tête. Alors, vient un moment où vous dites « j'ai compris ». Mais quand vous dites « j'ai compris qu'un éléphant n'est pas une souris », cette compréhension est encore dans la tête ; en revanche quand vous posez la question « qui suis-je ? », qui n'est pas un objet ni un concept, immédiatement cette compréhension devient « être compréhension » et « être compréhension » immédiatement se place dans le cœur ; alors, il y a amour. Il n'y a plus de représentation d'aucune compréhension, il n'y a plus rien où la discrimination trouve sa véritable dissolution. On peut dire aussi que c'est la dernière porte. Le cœur est la dernière porte, la dernière des dernières, et la première aussi. Vous êtes complètement en expansion, car l'amour est expansion. Tant qu'il y a contraction, l'ego est encore dans "la maison".

Peut-on ouvrir le cœur avec la respiration ? Avec la pensée ?

Non, vous ne devriez jamais utiliser la pensée pour ouvrir le cœur : la pensée sert à la compréhension, elle doit être claire ; vous devez avoir une perspective juste des choses, les voir très clairement. Cette vision claire nous concerne par la question « qui suis-je ? » qui ne peut être un objet de représentation. Ce que nous sommes ne peut jamais être "pensée", ne peut jamais être représenté ; donc, ce n'est pas un objet de notre compréhension, c'est la compréhension de ce que nous sommes fondamentalement, le non-objet qui nous ramène au cœur.

Peut-on ouvrir le cœur par la respiration ?

Je dirais, la pensée juste est la respiration juste. Quand vous pensez juste, la respiration est différente, quand il y a peur la respiration est agitée, quand il y a anxiété, quand il y a haine, la respiration est agitée. Quand il y a amour, la respiration est lente et régulière.

Jean, je vous ai vu clore vos entretiens enjoignant les paumes de vos mains, c'est « namasté » n'est-ce pas ? Qu'est-ce que « namasté » ? Dites-moi ce que cela signifie ?

« Namasté » signifie : « mon âme et votre âme sont une ». (Les mains jointes près du cœur) pour notre prochain, pour tous les gens que nous connaissons, (devant le visage) pour le guru et au-dessus de la tête pour Dieu.

mardi 24 mai 2011

Testez l'éveil maintenant !

Extrait de « L'urgence d'être » de David Deida

Imaginez que vous êtes victime d'un accident de voiture.
L'acier vous a déchiqueté et vous restez étendu sur la chaussée dans une mare de sang.
Imaginez-vous en train de dormir dans un lit douillet, puis mutilé dans un accident de voiture.
Le bien-être et la souffrance que vous ressentez alternativement ont une même origine qui se situe au niveau de la pensée.
Qu'est-ce que cela signifie ?
Comment découvrir la cause de votre souffrance et la source d'un vrai bonheur ? 
Qu'est-ce que tout cela a à voir avec un accident de voiture ou un lit ?
Pour connaître la réponse, faites l'expérience suivante.
Passez d'une sensation à l'autre : détendu, allongé dans un grand lit douillet ; mutilé, étendu dans une mare de sang. Représentez-vous les deux situations et ressentez-les l'une après l'autre. Encore et encore. Voyez clairement ces images et vivez-les avec intensité. Corps mutilé. Lit douillet.
Maintenant, en un instant, prenez conscience de ce « vous » capable d'expérimenter ces deux images qui n'étaient que l'objet de votre attention. Vous êtes cette capacité à ressentir.
Cet espace ouvert et sensible, conscient du mouvement de votre attention entre ces deux images, voilà ce que vous êtes en vérité.
Vous êtes l'espace où les images se produisent, où l'attention évolue entre un corps déchiqueté et un lit douillet. Les images changent, mais l'espace ouvert que vous êtes est toujours et invariablement prêt à ressentir.
L'éveil immédiat consiste à se détendre et à s'ouvrir en tant que capacité à ressentir, indépendamment de l'image qui apparaît à l'instant. Vous êtes alors libre de ressentir, quoi qu'il se passe, et d'agir en tant qu'amour.
Oubliez cet espace ouvert et sensible, ne serait-ce qu'une fraction de seconde, et vous serez à nouveau prisonnier. Souvenez-vous que vous êtes cet espace et vous découvrirez instantanément que l'amour agit spontanément, sans être entravé par le scénario actuel de votre vie.
Ne croyez pas un mot de ce qui vient d'être dit !
Découvrez ce qui pour vous est vrai quand vous faites cet exercice.
Voyez si vous changez avec la situation ou si vous êtes bien cet espace au sein duquel l'image apparaît, cette ouverture qui ressent les changements.
Testez l'éveil maintenant. 
Corps déchiqueté. Lit douillet. Les images sont différentes
Dans quel espace la lumière de votre imagination brille-t-elle ?
L'espace ouvert et sensible que vous êtes a-t-il changé quelque peu ?

dimanche 22 mai 2011

Le sage et la souffrance

Article du site « Propos sur la non-dualité et l'unicité absolue » de Monko


L'idée que le sage est libéré de toute souffrance ou empêtré dedans ne sont toutes deux rien d'autre que des balivernes. C'est toujours la même chose, la mentalité guru, la mentalité super-héros qui prennent racine dans l'idée que le sage serait quelqu'un. C'est tout simplement absurde.

Le fait est qu'il n'y a plus personne là pour souffrir ou être libéré de la souffrance.
Il y a juste Être, et Être est tout ce qui est, ce qui veut dire qu'il y a "Être Souffrance", comme il y a "Être Personne", ou "Être Temps", etc...
La seule différence, c'est qu'il n'y a là plus d'attardement sur ce qui est, et donc il n'y a plus personne pour souffrir à propos de la souffrance ou personne pour s'extasier à propos de l'extase. Plus personne pour ramener la souffrance dans le camps de l'extase ou du bonheur. Ainsi, ce qu'il se passe dans le cas de la Connaissance, c'est que plus aucune différence n'est faite en essence entre "Être Souffrance" et "Être-extase". Être Souffrance n'est plus une souffrance personnelle mais l'univers "souffrant".

Le sage peut donc connaître toutes les affres de la souffrance liée à une situation.
J'ai mis à dessein une représentation de Jésus sur la croix...
"Mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné !"... Ca te dit quelque chose?
De la même manière, Nisargadatta disait que "même si on me torturait, je ne quitterai pas ma véritable nature": il n'a pas dit qu'il n'y aurait pas souffrance. Mais il aurait dû car pour moi il peut y avoir mésentente... Mais "je n'ai plus peur de souffrir", "je ne souffre pas de souffrir", "je n'ai pas l'intention de demeurer dans l'extase", "Je ne tords plus le réel, ne triche pas et ne veux pas ramener le mal dans le camps du bien"; la souffrance est absolument sans cause, sans destination, sans désespérance, sans début ni fin, sans contour, etc...
Le soi-disant sage ne peut plus dire "je souffre à cause de", par exemple.
Il n'y a plus de raison, de sens, de relation, de fantasmagorie, d'histoire.
Ces histoires de "je souffre à cause d'un mental agité" ou "je suis heureux grâce à un mental apaisé" sont absurdes. Si c'est ça, il suffit de prendre des anxiolitiques, et hop, fini le mental, lui et le corps sont anesthésiés, et c'est la joie sans fin.

Mais le fonctionnement-sagesse est que rien ne peut se maintenir, plus personne n'est en relation ou tente de manipuler quoi que ce soit. Une fois "Être Souffrance" dissout, une disponibilité vierge est là, et "Être Extase" peut se révéler. Et c'est toujours l'ultime réalité, la vie même, Être.

En termes bouddhiste : il y a des êtres, probablement, vivant dans l'extase permanente - ce sont des bouddhas. Et il y en a d'autres qui ont abandonné cette extase et ont révélé en eux le Bodhisattva qui voit le nirvana et le samsara exactement au même instant et au même endroit sans l'once d'une seule différence entre les deux, sans que cela n'éveille le moindre mouvement ou considération.
Cela, c'est la réalisation de la Conscience "en tant que toute chose"...

samedi 21 mai 2011

Souffrance et culpabilité

Extrait de « Eclats de silence » de Daniel Morin



La souffrance apparaît sur la base de cette impossibilité, à savoir qu'il ne peut pas y avoir deux choses au même endroit et au même moment.

Je tiens ici à différencier la souffrance et la douleur : la douleur est un signal naturel qui permet d'orienter notre champ de conscience au niveau du corps physique, alors que la souffrance est une crise énergétique d'impossibilité.

Mais nous pouvons utiliser cette souffrance comme un signal que nous sommes en train de demander une chose impossible. C'est uniquement la vision de l'impossible qui arrête naturellement le processus de la souffrance.

J'ai observé durant les quatorze années de rencontres quotidiennes avec des personnes en recherche que la quasi-totalité d'entre elles se fondaient sur un sentiment de culpabilité, et basculaient dans des jugements dévalorisants : « Je m'y prends mal, je ne progresse pas, je n'y arriverai jamais, mon inconscient m'empêche d'avancer sur le chemin », etc.

Cette culpabilité est le résultat d'une comparaison incessante entre celui ou celle que nous sommes et celui ou celle que nous devrions être « à la place », entre la réalité et un idéal fictif.
J'affirme que la culpabilité est un obstacle à la vision claire et entretient l'idée fausse d'un individu séparé qui devrait atteindre quelque chose de spécial.

L'impossibilité énoncée sous forme de : « J'aurais dû être autre à la place de ce que j'ai été », ou « L'autre aurait dû être autre que ce qu'il a été » peut être transformée en désir possible : « Compte tenu de la situation, qu'est-ce que je peux faire maintenant ? ».

Cette proposition est possible à tout moment, quelles que soient les circonstances.

vendredi 20 mai 2011

L'Etoile Polaire

Extrait du livre « Au coeur du présent»
d'Osho


L'amour, c'est l'étoile polaire.
Tout bouge sauf l'amour.
Tout change ; seul l'amour reste permanent.
Dans ce monde changeant, seul l'amour est la substance immuable.
Tout le reste est un flux, momentané. Seul l'amour est éternel.
Il y a donc deux choses dont vous devez vous souvenir.
La première, c'est l'amour, car c'est la seule chose qui ne soit pas illusoire.
C'est la seule réalité ; tout le reste est un rêve.
Si on peut devenir aimant, on devient réel.
Si on atteint l'amour total, on devient soi-même la vérité, car l'amour est la seule vérité.
La seconde chose est de ne pas oublier que, quand vous marchez, il y a quelque chose en vous qui ne marche jamais. C'est votre âme, votre étoile polaire.
Vous mangez, mais quelque chose en vous ne mange jamais.
Vous êtes fâché, mais quelque chose en vous ne se fâche jamais.
Vous faites mille et une choses, mais quelque chose en vous reste absolument au-delà de l'action. C'est votre étoile polaire.
Ainsi quand vous marchez, souvenez-vous de ce qui ne marche jamais.
Quand vous bougez, souvenez-vous de l'immobile.
Quand vous parlez, souvenez-vous du silence.
Quand vous agissez, souvenez-vous de l'être.
Souvenez-vous continuellement de ce qui est absolument permanent, de ce qui ne vacille jamais, de ce qui ne chancèle jamais, de ce qui ne connaît aucun changement.
Cet immuable en vous est le réel. Et l'amour est le moyen de le découvrir.

jeudi 19 mai 2011

Méditation


Article paru dans le n°219 de la revue Recto-Verseau


Y a-t-il une façon de méditer ?

En vous promenant, êtes-vous «dans vos yeux, » les sens en éveil ?
Si oui, vous êtes en train de méditer.
Si vous pensez à vos préoccupations le long du chemin, ce n'est pas méditer.
Si, en écoutant quelqu'un, vous sentez votre silence et l'espace qui vous relie, vous êtes en train de méditer. Si vous n'écoutez pas car vous pensez à la réponse à donner ou à dire «c'est comme moi», ce n'est pas méditer.
Si vous utilisez des mantras, des prières, sans la joie intime et universelle d'exister, ce n'est pas méditer. Quelle que soit votre pratique, si vous êtes le spectateur vivant et émerveillé de la naissance des pensées, dans ce cas, vous méditez.
Méditer, c’est être présent à ce qui apparaît de nouveau ; c'est être ému du miracle d'exister infiniment dans la forme et la non forme, dans cette émotion pure qui ne meurt jamais, acceptant ce qui est agréable ou désagréable, point d'équilibre entre j'aime, j'aime pas.

Est-ce que la méditation ne risque pas de nous éloigner de notre réalité quotidienne ?

La réalité du quotidien avec ses lois relatives et relationnelles nous rattrapera si nous nous éloignons de l’esprit de la « méditation active » qui est d’être naissant au milieu de nos joies, de nos souffrances, sans attentes, croyances, projections, illusions ou fantasmes. Vivre le mouvement de la réalité quotidienne, c’est être le spectateur aimant de l’apparition de chaque évènement comme il se présente. Faites de vos journées de la méditation en actes. Pratiquez la pensée-action !
« Centré(e) », soyez le point de jonction où se crée le monde éternellement quotidien.

Faut-il avoir suivi un enseignement pour pouvoir pratiquer la méditation ?

Dans la voie progressive : oui. Le suivi et l’enseignant sont une aide temporaire jusqu’à la maturité méditative. La preuve de cette maturité se révèle dans la qualité relationnelle de communication avec les autres personnes. A ce stade, tous sont élèves de la vie sans identification à un rôle. Les outils pédagogiques s’inventent en direct entre l’enseignant et les élèves.
Dans la voie directe : chaque jour, chaque nuit, chaque pensée, parole, fleur, arbre, animal, humain et galaxie sont un enseignant qui nous mène à la méditation.

La méditation est-elle la solution pour amener la paix intérieure ainsi que dans le monde ?

Dans ce paradis en chantier dans lequel nous vivons, la seule paix sur laquelle nous pouvons avoir une influence réelle immédiate, c’est celle qui existe en nous à l’état naturel. Il est de notre responsabilité de la retrouver au sein de notre esprit par la méditation. Plonger d’une vie de surface, de doute et d’inquiétude dans le courant de la paix joyeuse et libre, aide à l’éveillance et au grandir de chaque être humain et du monde en même temps. Le monde n’est pas à l’extérieur de vous. Ayant réalisé cela, vous en devenez le serviteur. De cette vision s’ensemencent des graines fécondes pour tout l’environnement et la vie qui passe de formes en formes, de générations en générations.

Faut-il méditer tous les jours ?

Dans la voie progressive, l’initiation temporelle et méthodique est une aide ; mais surtout un principe naturel et inné est à redécouvrir, à réinventer, contenant le plaisir de méditer sur notre propre découverte. Où que vous alliez, c’est à votre propre découverte que vous allez. Quoi que vous fassiez, c’est à votre propre découverte que vous allez.
Dans la voie directe qui est une phase de maturité pédagogique, il n’y a plus d’assistance extérieure : lieu, horaire, phrase, son, postures, mantra…, tout est à l’intérieur et à l’extérieur simultanément. La méditation infinie et illimitée devient une pratique en permanence. 24h sur 24, vous êtes branché(e) sur « Radio Présence »… (rires)

mercredi 18 mai 2011

L'accueil de l'autre : une pratique consciente

Extrait de « L'obligation de conscience»
de Yvan Amar



Aussi surprenant que cela puisse paraître et depuis toujours, le grand enseignement traditionnel se résume avant tout à l'hospitalité : l'accueil de l'autre, l'accueil de l'étranger, celui - ou cela - qu'on ne connaît pas.
Cette pratique de l'hospitalité constitue profondément la pratique de la relation consciente : entrer encore et toujours en relation consciente avec l’autre, l'inconnu, l'étranger, celui qu'on n'attendait pas... et Dieu sait qu'il nous en arrive qu'on n'attendait pas !
Le couvert est toujours dressé sur la table sur l'autel intérieur pour partager le pain et le vin de l’esprit. L'obligation de la relation consciente consiste à faire de chaque rencontre l'opportunité de la reconnaissance de Sa volonté.
Quelque chose, en nous, nous pousse constamment à entrer en relation.
La tâche n'est pas nécessairement reconnue, dans une intimité solitaire où s'entend la parole de Dieu., où se ressent la divine volonté à laquelle on peut répondre d'une façon de plus en plus éclairée et consciente.
La tâche peut aussi être reconnue lorsque, à travers la relation consciente avec l'autre, celui qu'on n'attendait pas, la divine volonté se manifeste : celle qui nous a poussés à entrer en relation avec l'autre pour qu'au cœur de cette relation Sa volonté se reconnaisse.
Le premier temple d'une telle révélation, c'est notre propre présence et sa prolongation immédiate, qui en fait le second temple par excellence, c'est la relation entre les êtres.
Le temple de la relation est aussi l'occasion de la révélation de Sa volonté, parce que c'est constamment cette volonté qui nous pousse à l’action et à la relation.
Le corps est la preuve irréfutable que nous sommes faits pour l'action.
Tout le corps est organisé pour l'action ; il n'est pas fait pour l'immobilité, il est fait pour l'action et pour la relation. Aller de façon consciente dans le sens de ce pourquoi il est fait, c'est se donner l'opportunité de la reconnaissance de Sa volonté.
Un élève vraiment sincère dans sa quête, sincère dans sa souffrance et dans sa relative compréhension de l'enseignement, sera toujours respectueux de l'enseignant.

mardi 17 mai 2011

Réaliser le témoin

Extraits de « La Voie directe : s'identifier à la conscience pure»
de Greg Goode


Pages 30 - 31

On réalise le témoin quand rien ne semble différent de la conscience pure.
On n'a plus cette impression qu'il y a la conscience pure et aussi des choses existant indépendamment d'elle. Même la violence, la maladie et la mort biologique ne semblent pas extérieures à la conscience pure. Elles ne semblent pas être des choses indépendantes faites de quelque chose d'extérieur à la conscience pure. Elles ne semblent pas mettre en danger la conscience pure.
À ce stade, la raison supérieure a pratiquement terminé sa tâche.
Le monde grossier, le monde subtil, le corps et le mental n'ont plus l'air d'exister à l'extérieur de la conscience pure. Les mondes grossiers (1) et subtils, le corps et le mental semblent constituer tout ce qui existe.
(1) Le monde grossier est le monde des objets physiques, y compris l'univers cosmologique, la terre, les rochers, les bâtiments, les arbres, les configurations du cerveau et du corps. Le monde subtil pourrait être appelé le monde des énergies, subtiles, des auras et d'entités comme les anges, les déités et les bodhisattvas, les paradis et les enfers, les vies passées et à venir, les objets et lieux oniriques. On pourrait aussi y inclure des choses abstraites comme la logique, les mathématiques, la physique quantique, la causalité, le langage, le bien, le mal, la temporalité et toutes les relations. Le mental comprend pensées, sentiments, émotions, sensations, souvenirs, valeurs et états tels qu'évanouissements, transes, samadhis, etc. Bien sûr, physiciens, chamans et comptables ne seront pas d'accord sur la composition de ces listes. Ce n'est pas grave. L'important ici c'est qu'aucun candidat au titre d'objet existant ne soit en principe omis. C'est ainsi qu'il faut voir cette liste !

Plus rien n'apparaît comme quelque chose d'indépendant, tout est fait de manifestations spontanées dans la conscience témoin.
Après avoir réalisé le témoin, on découvre que l'on n'est jamais parti de chez soi.
On n'a plus l'impression d'être né ni de devoir mourir.
Même si l'univers entier périt, vous, en tant que conscience pure, êtes toujours là.
On ne prend rien de tout cela personnellement, parce que les structures qui le permettaient paraissent n'avoir jamais existé.
On ne se sent plus le moins du monde seul, séparé ou aliéné.
On ne compare plus ses réalisations spirituelles à celles des autres.
On ne souhaite plus avoir les expériences d'autrui, puisqu'il ne semble plus que l'expérience soit quelque chose de personnel. Elle est devenue synonyme de conscience globale.

Votre expérience est totalement ouverte et délicieuse.
Votre expérience directe de chaque instant est en parfaite conformité avec les descriptions antérieures disant que la conscience pure est amour.
Ce délice n'est pas ressenti comme des manifestations de caractère agréable.
Il est beaucoup plus profond que cela.
Ce n'est pas un objet qui apparaît.
On le ressent globalement comme la source et nature mêmes des manifestations.
Même les manifestations que l'on appellerait normalement 'douleur' sont considérées comme délicieuses par ce délice lui-même. Rien n'est ressenti comme faisant exception à cette parfaite ouverture, douceur et clarté, à ce parfait amour.
C'est radical et révolutionnaire.
Et c'est votre état naturel.

mercredi 11 mai 2011

Une description...

Extrait de « Etre » de Nathan Gill


Unicité ou Être, bien qu'indivisible, pourrait être considéré comme ayant deux aspects : la conscience, et le contenu de la conscience apparaissant maintenant.
Le contenu de la conscience est constitué de toutes les différentes perceptions qui apparaissent : images visuelles, sensations, bruits, pensées, sentiments... Toutes apparaissent en ce moment dans la conscience, mais la pensée semble offrir une dimension supplémentaire : la capacité d'un apparent détournement hors de la présence pour entrer dans une histoire « moi » en tant qu'individu, entité séparée localisée dans le temps et dans l'espace.
Cette histoire « moi » est ancrée dans la pensée, et puisque la pensée n'est qu'un fragment du tableau complet, lorsque l'histoire apparaît en tant que réalité, elle est accompagnée d'un sentiment de manque. La recherche d'entièreté, de complétude, est l'histoire de la tentative visant à combler un sentiment de manque.
La quête de complétude survient de mille façons différentes, l'une d'entre elles étant la recherche de l'illumination. Et là comme ailleurs, elle se focalise inévitablement dans les limites de l'histoire personnelle, la vision partielle, psychologique de la réalité, et par conséquent ne peut déboucher sur un sentiment de plénitude durable.
Dès lors que le théâtre de la vie est perçu autrement que du point de vue psychologique - du point de vue de « mon » histoire - le tableau est non personnel, non fragmenté, libre de tout sentiment de manque. Il est probable que tout apparaisse exactement comme auparavant, mais sans la vision déformée qui le fait « mien ».

Alors que peut-il être fait pour détourner l'attention de l'histoire personnelle ?

Rien ne peut être fait, car il n'est, en réalité, aucune entité présente qui pourrait faire quoi que ce soit. L'histoire personnelle est ce qui donne l'impression d'un « quelqu'un » qui accomplit des choses, opère des choix, prend des décisions, etc, alors qu'en réalité, ce quelqu'un, ou « moi », est simplement un commentaire émergeant avec tout le reste de ce qui apparaît.
En l'absence du commentaire, où lorsque le commentaire est vu comme tel, il est tout à fait évident que tout se produit ou apparaît entièrement de soi-même spontanément. Personne ne fait quoi que ce soit.

Mais qui le voit comme un commentaire ?

Toutes les images apparaissent ou sont enregistrées au sein de la conscience. Il n'est personne, aucune entité, pour le voir. Tout ceci se produit simplement en l'Être. Le commentaire intérieur a pour effet de personnifier l'aspect conscience de l'Être, donnant l'impression d'un quelqu'un, là où en fait il n'est personne.

Le fait d'entendre qu'il n'est rien à faire peut être très frustrant tant qu'il demeure le sentiment d'un quelqu'un capable de faire quelque chose.

Oui, toutes les fois où il y a la notion d'un « quelqu'un », il y aura une impression correspondante d'agitation ou de frustration, le besoin de combler un sentiment de manque. Il se peut que la tentative de combler ce sentiment de manque prenne la forme de pratiques diverses, comme le questionnement de soi ou la méditation, ou il se peut aussi qu'entendre une simple description de tout ceci soit suffisant pour que la recherche soit vue pour ce qu'elle est réellement.

Dans les moments où survient une compréhension de ce dont vous parlez, il y a un réel sentiment de soulagement.

La compréhension peut certainement engendrer un profond sentiment de soulagement. Mais la compréhension (dans le sens où j'utilise ce mot) demeure encore quelque chose qui fait partie de l'histoire « moi ».

Mais la compréhension peut-elle également conduire hors de l'histoire, conduire à l'illumination ?

Si l'histoire est vue pour l'histoire qu'elle est, aucune compréhension ou quoi que ce soit d'autre n'est requis pour « conduire hors » d'elle.

Alors, percer l'histoire à jour, ou la disparition de l'histoire - est-ce l'illumination ?

« L'illumination » paraît être importante uniquement du point de vue du « moi ». Seule l'histoire «moi» exige l'illumination. Votre véritable nature est Être, et Être est déjà tout ce qui est (même lorsqu'il semble que cela soit ignoré) sans aucune exigence quelle qu'elle soit.

Donc, même l'apparente ignorance de Votre nature véritable est encore une expression de Votre nature véritable ?

Toute ignorance et toutes histoires ayant trait à surmonter l'ignorance sont la parfaite expression de l'Être. Il est impossible d'éviter d'Être. Quelle difficulté y a-t-il à être ? Être est toujours, indépendamment de ce qui apparaît.

Toute une variété d'enseignants prescrit des méthodes et des techniques qui semblent produire des résultats.

Oui, et tout aussi souvent, elles ne produisent pas de résultats. C'est une histoire intéressante, n'est-ce pas ?

Alors tout cela se produit comme cela se produit ? L'enseignant prescrivant une technique, les étudiants pratiquant la technique et des résultats qui surviennent ou non - sans qu'il puisse en être autrement ?

Exactement. Tout se produit entièrement de soi-même car il n'est personne en fait pour faire arriver quoi que ce soit. « Je » fais partie de ce qui se produit, il n'en est pas la cause.

Tout se passe peut-être de soi-même, et pourtant il semble souvent qu'il y ait un « moi » faisant des plans, prenant des décisions, faisant des choses.

C'est le commentaire de la pensée qui, semble-t-il, divise ce qui apparaît en un quelque chose en train d'être fait par un quelqu'un.
Mais il n'y a rien de mal à cela. Il ne s'agit pas de quelque chose qui a besoin de disparaître pour que quelque chose d'autre appelé illumination prenne le relais. S'il y a la notion « moi », c'est alors ce qui est, c'est cela qui apparaît en tant que réalité. Si cette notion « moi » est percée à jour, c'est alors cela qui est. Être est déjà le cas, quelle que soit la configuration des apparences.

Un abandon soudain et total de la notion « moi », de l'identification - quelle qu'elle soit - pourrait aussi avoir lieu, bien entendu.

Oui, cela pourrait arriver à mi-parcours de l'histoire.

Mais l'identification pourrait réapparaître ?

Peut-être la notion « moi » pourrait-elle ressurgir, mais tout va-et-vient n'est rien de plus que le jeu de la vie. En ce qui concerne Votre nature en tant qu'Être, l'absence ou la présence d'un soi personnel est sans conséquence. Être simplement est, et toutes ces apparences et survenues diverses peuvent simplement être décrites comme le divertimento cosmique. En fait, rien ne s'est jamais passé.

mardi 10 mai 2011

Florilège n°3

Extrait de « My Secret is Silence »
(Mon secret est le silence) d'Adyashanti
Traduction : Isabelle Padovani
Nota bene : ce livre n'a jamais été publié en français 


Je suis ici pour retirer vos illusions :
vos illusions de contrôle, de liberté, de "moi".
Vous pensez que vous avez le contrôle, mais vous ne l'avez pas.
Vous pensez que vous avez la liberté, mais vous ne l'avez pas.
Vous pensez que vous avez un "moi", mais vous ne l'avez pas.
***
Aussi longtemps qu'il y a un corps il y aura un sens du "moi".
Mais vous vous tenez avant ce sens du "moi".
Même s'il est là, vous lui êtes antérieur, en tant que "Je".
***
Une totale acceptation de vous-même conduit à une totale transcendance de vous-même.
***
La sagesse sans amour est comme avoir des poumons mais pas d'air à respirer.
Ne cherchez pas la sagesse en vue d'acquérir de la connaissance, mais en vue de vivre et aimer plus pleinement.
***
 Aucune personne ni aucun évènement n'a le pouvoir de vous rendre heureux ou malheureux.
***
L'amour spirituel est l'expression d'un Soi non-divisé.
***
Il n'existe rien d'autre que l'Un en relation avec lui-même.
***
Il y a quelque chose de plus profond que la souffrance et le plaisir : vouloir savoir ce qui est vrai.
***
Voici un secret : Bouddha n'est jamais né, pas plus que Bouddha n'a été absent de la naissance, la vie ou la mort.
***
A chaque moment nous exprimons ce que nous nous savons être.
Si nous nous connaissons très peu, nous exprimerons et manifesterons cette inconscience de notre nature véritable.
Si nous connaissons ce que nous sommes très profondément, nous l'exprimerons et le manifesterons dans ce que nous faisons.
C'est aussi simple que ça...

dimanche 8 mai 2011

Le Chant du Réveil



Voyage au coeur de l'instant

14 et 15 mai 2011 à Vincennes

"Le Chant du Réveil"

"Ce que vous êtes voit ce qui est, et en fin de compte, se voit lui-même..."


"Dans la ville d'Ispahan, dans une petite maison basse de terre ensoleillée, à la façade ornée d'un cadran solaire à demi effacé, vivait un homme. Une nuit, il rêva d'une ville opulente, près d'un fleuve traversé par un pont. Vers ce pont il avança et soudain fit halte, émerveillé, au pied de la première borne. Là était, dans un grand coffre ouvert, un prodigieux trésor de pièces d’or et de pierres précieuses. Enterré sous un arbre, à l'autre bout du monde, dans cette cité magnifique. Tandis qu'il contemplait ce mirifique trésor, il entendit une voix qui disait "- Tu es ici dans la grande cité du Caire, en Egypte. Ces biens, ami, te sont promis". Il se mit aussitôt en route en quête de ce trésor merveilleux, bravant mille dangers, traversant moultes contrées, vivant péripétie sur péripétie. Enfin, après un long voyage, il arriva enfin dans la cité de son rêve, et trouva le pont, et la borne. Il courut vers elle, les mains déjà tendues à la fortune, mais presque aussitôt se prit la tête en gémissant. Là n’était qu’un mendiant, qui lui tendit la main en quête d’un croûton de pain. De trésor, pas la moindre trace. Alors notre coureur de songes, à bout de force et de ressources, désespéra. “A quoi bon vivre désormais, se dit-il. Plus rien de souhaitable ne peut m’advenir en ce monde.” Le visage baigné de larmes, il enjamba le parapet, décidé à se jeter dans le fleuve. Le mendiant le retint par le bout du pied, le ramena sur le pavé du pont, le prit aux épaules et lui dit :
- Pourquoi veux-tu mourir, pauvre fou, par un si beau printemps ?
L’autre en sanglotant lui raconta tout : son rêve, son espoir de trouver un trésor, son long voyage. Alors le mendiant se prit à rire à grands éclats, se frappa le front de la paume, et désignant alentour comme un bouffon faramineux :
- Voilà bien le plus parfait idiot de la terre dit-il. Quelle folie d’avoir entrepris un voyage aussi dangereux sur la foi d’un rêve ! Je me croyais d’esprit malingre, mais après toi, bonhomme, je me sens sage comme un sain derviche. Moi qui te parle, toutes les nuits, depuis des années, je rêve que je me trouve dans une ville inconnue. Son nom est, je crois Ispahan. Dans cette ville est une petite maison basse de terre ensoleillée, à la façade pauvrement ornée d’un cadran solaire à demi effacé. Devant cette maison est un champ de cailloux, au bout de ce champ une source et un figuier. Toutes les nuits, dans mon rêve, je creuse un trou profond au pied de ce figuier, et je découvre un coffre empli à ras bord de pièces d’or et de pierres précieuses. Ai-je jamais songé à courir vers ce mirage ?
Non. Je suis, moi, un homme raisonnable. Je suis resté à mendier tranquillement ma pitance sur ce pont fort passant. Songe, mensonge, dit le proverbe. Où Dieu t’as mis tu aurais dû demeurer. Va, médite et sois à l’avenir moins naïf, tu vivras mieux.
Le paysan, à la description faite, reconnut sa maison et son figuier. Le visage tout à coup illuminé, il embrassa le mendiant éberlué par cet accès subit d’enthousiasme et retourna à Ispahan, courant et gambadant comme un homme doué de joie inépuisable. Arrivé chez lui, il ne prit même pas le temps d’ouvrir sa porte. Il empoigna une pioche, creusa un grand trou au pied de son figuier, découvrit au fond de ce trou un immense trésor..."
(Conte Soufi)
Nous sommes comme ce rêveur qui cherche un trésor en une contrée lointaine, alors qu'il a toujours été là où il se trouvait... Cependant, même si nous "savons" cela, nous continuons à ne pas trouver ce trésor, soit parce que nous en avons une fausse idée, soit parce que nous faisons une confusion entre rêve et réalité, rêveur et rêvé... Et même lorsque nous avons réalisé ce qu'est et où se trouve le "trésor", il nous semble encore qu'il nous échappe parfois...Le trésor dont il est ici question est la réalisation que nous ne sommes pas ce que nous croyons être : la Conscience joue à s'oublier en un "moi" dans lequel elle s'amuse à s'identifier... puis, à un moment donné, elle se dévoile à elle-même...
 Si cette phrase nous interpelle, si ce thème nous intéresse, c'est que la Conscience, en nous, a commencé son chemin du retour vers la révélation d'elle-même. Les étapes de ce chemin du retour sont décrites dans les images colorées du Tarot...
                 

Le livre d'images du Tarot est un de mes compagnons de route depuis une vingtaine d'années : j'aime voir chacun de ses arcanes comme l’illustration précise d'un mouvement de conscience particulier permettant de se "réveiller" de l’identification erronée à nos sensations, émotions et pensées...
Le Mat et les arcanes XV à XXI nous invitent tout particulièrement au retournement de notre attention en vue de vivre l’expérience directe de notre nature véritable.
Au fil des arcanes, seront partagés les "moyens précieux" permettant d'exercer les deux grandes capacités de la conscience, l'attention et l'ouverture, l'intention du stage étant de partager les "moyens habiles" permettant de nous réveiller de l'illusion de l'identification au corps-mental.

Programme des pratiques de ce week-end :
 
- les 7 clefs sonores (kototama, "mots-âmes") des 7 arcanes XV à XXI,
permettant de favoriser l'expérience directe de notre nature véritable.
 
- sera également transmis et pratiqué l'ordre des "rythmes-pères"
permettant d'altérer le conditionnement mental habituel, pour perce-voir la réalité de Ce Qui Est.
.

Stage ouvert à tous, sans aucun pré-requis :

il reste encore des places !

Télécharger le bulletin d'inscription :
 

ou
S'inscrire en ligne : 



Stage animé par Isabelle Padovani


Ce stage aura lieu au Centre Arkanciel, 17 avenue de Paris, à Vincennes.

Le montant des frais de participation est de 190 € pour le week-end.

Horaires :
   de 10h00 à 12h30 et de 14h00 à 18h00 le samedi
                        de
09h30 à 12h30 et de 14h00 à 17h30 le dimanche
Pour tous renseignements complémentaires :
06 86 59 57 16

Je suis et je ne suis pas

Article du site « Propos sur la non-dualité et l'unicité absolue » de Monko

Photo et oeuvre d'Andy Goldsworthy

Je ne suis pas arrivé, je ne vois nul lieu ni état ni vérité à atteindre, et je ne suis jamais parti, car je n'ai jamais eu aucun point d'ancrage d'où m'élancer, aucun appui, aucun support d'où exercer une pression, avec le corps, la pensée, les sens...
L'arrivée et le départ, le gain et la perte, la naissance et la mort, la création et la destruction sont en réalité un seul et même point où l'impossibilité absolue qu'il se passe la moindre chose vire immanquablement à un débordement d'activité, cette unité qui vire au débordement majestueux et sensuel de l'altérité, cette immobilité absolue de l'univers qui ne vibre que d'un incessant mouvement...

Vous comprenez, je ne crois pas plus qu'il y ait quelque chose plutôt que rien ou qu'il y ait rien plutôt que quelque chose; je ne crois pas plus qu'il n'y ait personne plutôt que quelqu'un, et inversement; je ne crois pas plus que quelque chose puisse être faux plutôt que vrai ou inversement ; je ne crois pas que la conscience puisse être impersonnelle, intemporelle, pas plus et pas moins qu'elle ne puisse être personnelle et temporelle, et à cet instant tout en moi crie en silence que les deux sont un ; et je ne crois pas plus que ce qu'on nous dit apparaître et disparaître en elle puisse être à son tour personnel et temporel, et inversement ; et je ne vois nulle distinction entre la conscience et son objet ; je ne crois pas plus en une Conscience qui soit continue, éternelle et désincarnée, pas plus que si elle était impermanente, allant et venant et incarnée...

Je ne crois plus en cette spiritualité sèche, bourgeoise et étonnament patriarcale, cette glorification de la sagesse et de la Conscience "en arrière-plan" éternelle que nous serions et qui verrait, sans en être affectée, aller et venir le monde. Cette spiritualité suinte encore la peur, la peur du féminin, la peur du vivant, de l'intimité, de la pensée, du corps (ce sac de merde...imaginez un peu). Parce que "tout est Conscience" est égal, pour moi, à "tout est corps", à "tout est pensée", à "tout est sens". Et c'est ainsi que tout est amour.

Je ne crois pas à ce que la manifestation puisse aller et venir dans la Conscience, mais je ne crois pas non plus que cette impossibilité soit impossible. La compréhension que Conscience soit "en tant" que tout ce qui est n'empêche nullement qu'il puisse se dévoiler l'expérience d'une conscience "consciente de ce qui est", mais la compréhension n°2 ne peut englober la première. La compréhension n°2 vue comme absolue n'est ni plus ni moins qu'une spiritualité mal digérée, pas aboutie, qui a encore quelque chose à enseigner, à atteindre, à faire comprendre, à transmettre. Mais la beauté, c'est qu'elle a encore quelque chose à perdre.

Et moi ? Je suis comme un amoureux qui a fini par perdre l'objet de son amour, qui s'est libéré de lui ; conscience libérée de la conscience, corps libéré du corps, pensée libérée de la pensée, sens libérés des sens, perception libérée de la perception, monde libéré du monde. Tout ceci n'est pas moi et n'est pas autre.

Alors la Conscience ? Je ne vois rien d'autre et je ne sais pas ce que c'est. Pourtant sa nature m'éclabousse au moindre regard, dans la moindre sensation... Je suis la sensation et libre de la sensation. C'est un mystère, mais un mystère sans peur.

Je ne suis pas dans l'advaïta, dans le christianisme, dans le soufisme, dans le zen... Quel ennui... Et pourtant, tout cela existe en moi, à l'état de vaste débordement, de vaste évidence, d'amour sans objet, si on veut... Je pourrais encore en dire tant là-dessus... Mais voyez-vous, tout en laissant une folle passion écrire ceci, je ne trouve aucun intérêt particulier ou personnel à tout ceci. Même à ceci je n'accorde aucune croyance, et je ne m'intéresse pas au vrai ou au faux.
Mais le vivant, intensément, doit éclore et éclabousser, maintenant.
Si c'est le corps, si c'est la pensée, si c'est le travail, ce ne peut être que le Vivant, sans naissance, sans extinction. M'étant perdu, je suis en une forme d'éternel Devenir, mais libéré du temps, de la psychologie, sans recherche. Ayant perdu l'objet (et le sujet) de mon amour, mon amour n'a plus rien à perdre, bien qu'il perde et retrouve sans cesse.
Oh ce divin mystère... Jamais il ne fut découvert : qui aurait ce fou désir ? La vie est et n'est pas exactement au même instant. Qui pourra comprendre ça ? Quel sage, quel prophète, quel messie ? Quel est l'ignorant qui va lever le doigt pour dire "moi!" ?
Celui qui ne trouve pas son contentement dans son ignorance fondamentale, dans son ignorance ouverte, ne peut connaître la sagesse, et celui qui ne sait pas qu'il ne peut pas aimer ne trouvera jamais l'Amour, l'Amour sans demeure.

Alors que faire ou pas faire ?
Mais je n'en sais strictement rien, je ne suis ni enseignant ni policier.
Néanmoins ceci : faites ce que vous avez à faire, avec passion, intensité, amour, folie pourquoi pas, raison, bon et mauvais sens ; mangez, buvez, dormez, travaillez, méditez si vous en avez la fantaisie (mais fantasmez sérieusement alors!!), avec un intérêt qui dépasse votre propre psychologie : buvez comme si c'était votre premier et dernier verre, dormez ou effectuez un travail comme si c'était la première fois et la dernière.
Après vous être trouvé dans la Conscience sans objet, perdez vous dans la totalité, à chaque instant.
Je veux dire, ne le faites pas, mais si le parfum de cela vous touche, c'est parfait.
Sinon, c'est parfait aussi...

samedi 7 mai 2011

Les étiquettes

 Extrait de « Lorsque la conscience s'éveille »
d'Anthony De Mello



L'important n'est pas de savoir qui est «je» et ce en quoi il consiste.
Vous n'y arriverez jamais. Il n'y a pas de mots pour le décrire.
L'important est de laisser tomber les étiquettes.
Les maîtres zen japonais disent :
«Ne cherchez pas la vérité, contentez-vous de laisser tomber vos opinionsLaissez tomber vos théories, ne cherchez pas la vérité.
La vérité n'est pas une chose que l'on doit chercher.
Lorsque vous cesserez d'avoir des opinions, vous saurez.
Ce que je veux dire par «étiquette» ?
Toutes les étiquettes qu'il vous est possible de concevoir, sauf peut-être celle d'être humain. Je suis un être humain.
On ne peut pas affirmer que cela veuille dire grand chose.
Mais lorsque vous dites: «Je suis un être qui réussit», cela n'a pas de sens.
Le succès ne fait pas partie du «je».
Le succès est une chose qui va et vient ; il peut être ici aujourd'hui et disparaître le lendemain. Ce n'est pas «je». Lorsque vous dites : «Je suis un être qui réussit», vous êtes dans l'erreur, vous êtes plongé dans les ténèbres. Vous vous identifiez avec le succès. C'est pareil lorsque vous dites: «Je suis un être qui a échoué, ou je suis un avocat, ou je suis un homme d'affaires
Vous savez ce qui va vous arriver si vous vous identifiez avec ces choses, n'est-ce pas ? Vous allez vous y accrocher, vous allez avoir peur qu'elles vous échappent, qu'elles s'écroulent, et c'est là que commenceront vos souffrances.
C'est ce que j'ai voulu exprimer lorsque je vous ai dit: «Vous souffrez parce que vous êtes endormi
Voulez-vous que je vous donne une preuve de votre sommeil ? Vous souffrez.
La souffrance prouve que vous avez perdu contact avec la réalité.
La souffrance vous est donnée afin que vous ouvriez les yeux sur la vérité, afin que vous puissiez comprendre qu'il y a un mensonge quelque part.
Elle est comme ces douleurs physiques qui vous sont données afin que vous puissiez comprendre qu'une maladie ou un problème physiologique est en vous.
La souffrance survient lorsqu'on se heurte à la réalité.
Lorsque les illusions se heurtent à la réalité, lorsque les mensonges se heurtent à la réalité, on souffre. En dehors de cela, il n'y a pas de souffrance.